Les intérêts hypothécaires suivent depuis longtemps une tendance à la baisse. Les locataires n’y ont pourtant rien gagné ou presque. Principal responsable? Celui qu’on appelle le taux de référence applicable aux contrats de bail, qui détermine la hausse ou la baisse des loyers pour toute la Suisse depuis le 10 septembre 2008. Il a remplacé les taux variables pour les hypothèques des banques cantonales, décisifs par le passé. Mais la façon dont il est calculé n’est pas favorable aux locataires, du moins en cas de baisse.
Le système fonctionne com me suit: chaque trimestre, la Banque nationale suisse (BNS) formule un taux d’intérêt moyen à partir des données fournies par les banques dont les créances hypothécaires sont supérieures à 300 millions de francs. Le premier recensement a abouti en juin 2008 à une moyenne de 3,43% (voir tableau). Comme prévu par l’ordonnance du Conseil fédéral sur le bail à loyer, cette moyenne a ensuite été arrondie à 3,50%, avant son entrée en vigueur le 10 septembre 2008.
Selon la nouvelle réglementation, le taux de référence ainsi obtenu est ajusté dès que le taux d’intérêt moyen évolue d’un quart de point. Lorsque le taux moyen monte à 3,68% (3,43 + 0,25), le nouveau taux de référence est fixé à 3,75%.
A l’inverse, si le taux moyen chute à 3,18% (3,43 – 0,25), le nouveau taux de référence s’établit à 3,25%.
Un écart de 0,31%
Jusqu’à présent, cette façon de procéder a toujours empêché le taux de référence de baisser au niveau du taux moyen. Alors que ce dernier est en baisse constante depuis maintenant plus d’une année, le taux de référence stationne, quant à lui, à 3%. Depuis le 2 septembre 2010, l’écart atteint même un maximum de 0,31%! Or, les locataires ne sont en droit d’exiger une baisse de leur loyer que si le taux de référence officiel est inférieur à celui qui est indiqué dans leur contrat de bail.
Nous avons fait le calcul: en 25 mois d’existence, le taux de référence est resté supérieur de 0,15%, en moyenne, au taux d’intérêt moyen. En sachant que les hypothèques atteignent en Suisse un total de 600 milliards de francs et que 60% des logements sont occupés par des locataires, on peut en déduire que quelque 360 milliards de francs sont destinés au financement de biens immobiliers mis en location. Entre septembre 2008 et octobre 2010, ce ne sont donc pas moins de 540 millions de francs par année (0,15% de 360 milliards) auxquels les locataires n’ont pas pu prétendre au titre de réductions de loyer.
L’Association suisse des locataires (Asloca) n’a pas manqué de critiquer le modèle en vigueur. L’automne dernier, elle a proposé une modification qui aurait permis de rapprocher le taux de référence du taux moyen. Le Département fédéral de l’intérieur a rejeté la proposition, en se réfugiant alors derrière la révision en cours du droit du bail. Mais cette réforme, qui visait à découpler les loyers des taux hypothécaires, a été enterrée à la mi-septembre par le Parlement. La situation actuelle semble donc devoir perdurer.
Stefan Schuppli / Frank-Olivier Baechler
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