Les limites du travail sur appel
Les heures d’attente doivent être payées et l’employeur ne peut réduire brutalement l’emploi proposé. Mais la protection du travailleur reste faible.
Sommaire
Bon à Savoir 04-1999
14.04.1999
Sylvie Fischer
Deux arrêts récents* du Tribunal fédéral posent des limites au travail sur appel (l’employeur appelle son employé seulement lorsqu’il a du travail pour lui). Mais quels sont les droits de celui qui accepte un tel contrat?
• «Le travail sur appel est-il légal?» Oui. La loi n’interdit pas le travail sur appel. Par contre, tout contrat de travail est régi par le Code des obligations, et notamment par plusieurs dispositions impératives: en clair, la loi impose une certaine ...
Deux arrêts récents* du Tribunal fédéral posent des limites au travail sur appel (l’employeur appelle son employé seulement lorsqu’il a du travail pour lui). Mais quels sont les droits de celui qui accepte un tel contrat?
• «Le travail sur appel est-il légal?» Oui. La loi n’interdit pas le travail sur appel. Par contre, tout contrat de travail est régi par le Code des obligations, et notamment par plusieurs dispositions impératives: en clair, la loi impose une certaine protection du travailleur, que l’employeur doit respecter. C’est le cas du délai légal de congé: l’employeur ne peut mettre fin d’un jour à l’autre au contrat. Il doit respecter un certain délai, qui varie selon les années de service (335c CO). Les juges en ont déduit que lorsqu’un employeur diminue brutalement le volume de travail proposé au travailleur sur appel (dont le salaire mensuel passe de 4000 à 330 fr. par exemple), il viole la loi, car il vide de sa substance cette protection. Le délai de congé doit en effet permettre au travailleur de chercher une nouvelle place, sans perdre l’essentiel de ses ressources financières. Dans un tel cas, le travailleur a donc droit à son salaire jusqu’à l’échéance du délai.
• «Comment sera calculé ce salaire, dès lors que le travailleur n’a pas pu offrir ses services?» Le fait que, pour des raisons économiques, l’employeur n’ait pas pu fournir assez de travail ne doit pas être supporté par l’employé: ce «risque de l’entreprise» est à la charge du patron, ont rappelé les juges. Conséquence: si l’employeur ne peut pas fournir assez de travail, il doit tout de même le salaire. Pour le calculer, les juges se sont référé à l’art. 326 CO qui concerne le cas de l’employé travaillant exclusivement aux pièces ou à la tâche pour un seul employeur. En bref, le salaire sera calculé sur la moyenne des rémunérations perçues pendant une période équitable.
• «Les heures d’attente à la maison doivent-elles être payées? Et combien?» En principe oui, a jugé le TF, car le fait de se tenir prêt à effectuer en tout temps un travail sert aussi
les intérêts de l’employeur. Mais la rémunération de ce temps d’attente sera plus faible. De combien exactement? La réponse des juges reste floue. Tout d’abord, cette rémunération peut être comprise dans le salaire: rien n’empêche donc un employeur de payer un salarié 8 fr. de l’heure, dédommagement pour heures d’attente compris. Ensuite, le TF laisse aux magistrats cantonaux le soin de la fixer, soit d’après l’usage, soit en équité. Conseil: faites préciser la rémunération du temps d’attente séparément dans votre contrat de travail.
Sylvie Fischer
*ATF 124 III 249 du 6 mai 1998; Arrêt du 14 décembre 1998, 4P.25/1998