A la fin du mois de juillet, Laure Recupido-Chételat, une lectri-ce d’Echallens (VD), s’envole pour Naples afin d’y célébrer son mariage en compagnie de toute sa famille. Au total, neuf personnes font le voyage dont Ernest Chételat, le père de la mariée. Or, le jour de la cérémonie, c’est le drame. Le père est frappé d’un malaise cardiaque, alors qu’il était jusque-là en bonne santé. Une ambulance le conduit à l’hôpital le plus proche. Durant ce trajet, il fait une attaque cérébrale. «Suite au diagnostic très pessimiste des médecins, nous avons voulu le faire rentrer en Suisse et là, la galère a commencé», raconte sa fille, encore sous le coup de l’émotion.
«Avant le départ, à l’achat des billets d’avion, nous avions contracté une assurance rapatriement et annulation auprès de l’Européenne Assurance Voyages SA et, aussi étonnant que cela puisse paraître, cette compagnie a refusé dans un premier temps de rapatrier mon père. Puis, dans un deuxième temps, elle nous a demandé de verser 18 500 fr. sur son compte dans les six heures à venir, faute de quoi elle n’entrerait pas en matière!»
Famille indignée
Indignée, la famille s’interroge: «Pourquoi une telle exigence, alors que nous avons justement payé une prime pour ce genre de cas?»
Et Fabien Chételat, fils de la victime, de poursuivre: «Les contacts avec l’Européenne Assurance ont été très difficiles. Nous devions tout le temps les relancer et eux n’ont cessé d’argumenter sur l’état de santé désespéré de mon père pour ajourner son rapatriement!»
Déclaré dans un profond coma par les médecins italiens, Ernest Chételat n’avait hélas pas de chance de survivre. Consciente de cela, la famille n’avait qu’un seul souhait, parfaitement humain: qu’il puisse décéder chez lui, en Suisse. «C’est tout ce qui comptait pour nous!», clament-ils encore aujourd’hui.
Par un concours de circonstance, et grâce à l’entremise de l’agence de voyage helvétique, Ernest Chételat a finalement pu revenir en Suisse, où il s’est éteint dans les
24 heures.
Ce rapatriement n’est pas dû à une volte-face de l’Européenne Assurance, qui maintient sa position initiale, mais à l’intervention de la Rega, qui a tenu compte de la volonté de la famille.
Débat
Vue du côté financier, l’histoire d’Ernest Chételat n’est pas close. Ce dernier n’ayant pas été donateur de la Rega, la facture de 13 500 fr. a tout naturellement été adressée à la famille de la victime. «Ce que nous comprenons, poursuit Laure Recupido, mais nous pensons que l’Européenne Assurance doit assumer tout ou partie de ces frais.»
L’argument semble valable, mais pas du point de vue de l’Européenne Assurance que Bon à Savoir a contactée. Après une description détaillée des faits, Thomas Tanner, membre de la direction, s’est tout d’abord refusé à tout commentaire pour, dit-il, «des raisons de confidentialité et de protection des données». Suite à notre insistance, il s’est néanmoins livré à quelques explications: «Notre centrale d’alarme décide si le rapatriement d’urgence est faisable du point de vue technique et médical, c’est-à-dire si le patient est transportable. Si les risques sont trop grands, le rapatriement des pays de l’Union européenne et de tout pays occidental est reporté aussi longtemps que nécessaire.»
Arguments peu humains
Très techniques et manquant pour le moins de considérations humanitaires, ces arguments ne figurent nullement dans les conditions générales d’assurance (CGA) de ladite compagnie. La famille de Ernest Chételat ne baisse donc pas les bras et va poursuivre ses démarches auprès de l’Européenne en vue d’obtenir le remboursement. Affaire à suivre, donc.
Confrontation d’assurances
En attendant, cette situation dramatique a de quoi laisser pantois plus d’un voyageur. Est-ce à dire qu’une assurance rapatriement n’est utile qu’en cas de petites blessures?
Pour en avoir le cœur net, nous avons soumis un cas similaire à diverses compagnies d’assurance. Si les critères de transportabilité sont bel et bien pris en compte, la plupart invoquent aussi des critères humains et de respect d’individus en détresse morale. Certaines nuancent en précisant que, dans les cas où le rapatriement n’est pas justifié par des arguments médicaux, elles ne prendraient pas forcément tous les frais à leur charge, mais que le rapatriement aurait lieu pour satisfaire au souhait de la famille.
Tout Compte Fait (N° 7/05), le partenaire financier de Bon à Sa-voir, a récemment publié un classement des assurances voyages*, établi par VermögensZentrum (VZ).
Les prestations de deux sociétés
y sont classées supérieures à la moyenne: le livret ETI du TCS et la Mobi Tour Multirisk de la Mobilière. Huit autres, dont une assurance proposée par l’Européenne, sont dans la moyenne et trois autres en dessous de la moyenne. Parmi elles, une autre formule d’assurance voyages de l’Européenne.
Zeynep Ersan Berdoz
*Le classement complet peut être consulté dans les archives sur www.toutcomptefait.ch