Yves Jault est un fidèle client de la Migros. Depuis vingt ans, il y fait ses courses quasiment tous les jours à Lausanne. Mais depuis deux mois, il ne comprend plus la logique de «son magasin».
La cause de sa rogne? La viande de foie de bœuf, qu’il achète régulièrement pour ses chats. Il avait l’habitude de la trouver dans des barquettes en sagex, recouvertes d’un film en plastique. Or, depuis trois mois, ce système classique a fait place à des emballages sous vide en plastique dur.
«Ces emballages sont insupportables à ouvrir. On est obligé de prendre des ciseaux ou un couteau, et de découper le plastique le long de la viande. On se met du sang partout, et en plus on risque de se blesser, car le plastique est très dur à percer», commente notre lecteur.
Il reproche en outre au nouveau système de générer un surplus de déchets. «Avant, les barquettes contenaient deux ou trois tranches. Aujourd’hui, chaque morceau est emballé individuellement. Un gaspillage éhonté», constate M. Jault.
Meilleure conservation
Le constat de notre lecteur ne concerne pas uniquement le foie. Les emballages en plastique dur sont aussi utilisés pour la viande de cheval, certaines viandes marinées ou encore le poisson.
Selon Maja Amrein, porte-parole de Migros, l’avantage de ce système est à la fois économique et écologique: «Ce type d’emballage, appelé Hi-vac ou seconde peau, permet de conserver la viande plus longtemps. Il s’agit d’une méthode de sous vide poussée, qui augmente l’inhibition microbienne. Elle est utile pour les produits particulièrement sensibles à la contamination bactérienne.»
Ainsi, une tranche de foie de porc vendue sous atmosphère contrôlée (soit dans les barquettes recouvertes de plastique) se conserve en moyenne 5 jours. Dans un emballage seconde peau, elle reste consommable environ 6 jours.
Pour la viande de cheval, le gain est encore plus important: 6 jours avec les barquettes, et 10 jours sous vide.
Plus-value écologique
Le système Hi-vac est donc tout bénéfice pour la Migros, qui peut garder les produits plus longtemps dans ses rayons et enregistre ainsi moins de perte. Mais il est aussi rentable d’un point de vue écologique, puisque moins de retours de marchandise signifie aussi moins de déchets.
De plus, ces barquettes réduisent le poids du matériel de fabrication de près de 30%. Elles sont en outre plus petites et plus maniables (car moins fragiles), ce qui diminue fortement leur volume de stockage et le nombre de transports.
Le géant orange, qui a effectué un écobilan des deux systèmes d’emballage, assure qu’ils se valent. Une analyse que confirme Jörg Birnstiel, porte-parole de Coop: «Nous utilisons aussi les deux techniques, car elles ont chacune des avantages et leur écobilan est identique. La technique sous atmosphère contrôlée coûte légèrement plus cher que le Hi-vac, mais elle reste nécessaire pour certaines viandes, comme les filets de bœuf ou de porc, pour des raisons de présentation.»
Sophie Pieren
protéger l’environnement
La vente au détail évite le gaspillage
Autorités publiques et industries sont sensibles à la problématique des emballages depuis de nombreuses années. Les multiples analyses déjà menées ont permis d’identifier les propriétés des différents matériaux d’empaquetage et de créer des systèmes plus respectueux de l’environnement.
Ainsi, Coop et Migros suivent de près leur production de déchets et tendent à utiliser des emballages qui soient, sinon recyclables, du moins le moins polluants possible.
Il n’en reste pas moins que le meilleur moyen de protéger l’environnement consiste à acheter ses produits au détail. «Aujourd’hui, la question n’est plus de savoir si tel plastique est meilleur que tel autre, relève François Marthaler, directeur du Bureau d’investigation sur le recyclage et la durabilité. Les gens devraient plutôt se demander s’il est vraiment rationnel d’acheter du préemballé. Ce système induit du gaspillage à la base, puisque le client n’achète jamais exactement ce dont il a besoin, mais se plie à ce que contient l’emballage. De plus, il n’a pas de contrôle sur le type et le nombre de matériaux utilisés pour parer son produit. En revanche, s’il achète sa viande directement chez le boucher, il peut lui apporter une boîte ou lui demander d’utiliser le moins de plastique possible.»
Tant que c’est possible, mieux vaut donc privilégier les systèmes de vente au détail.
La plupart des grandes surfaces offrent ce type de service pour les fruits et légumes (sauf dans les Migros de petite taille) et de nombreux magasins Coop disposent d’une boucherie, voire d’une poissonnerie. Sans oublier bien sûr les magasins de détail, tous farouchement acquis à la cause! S. Pi.