Le 2e pilier (prévoyance professionnelle) est non seulement un indispensable complément à l’AVS pour la retraite, mais aussi une assurance en cas d’invalidité et de décès. Après avoir vu qui doit être assuré (Bon à Savoir 2/00), voyons qui va toucher une rente dans ces trois circonstances.
Première chose à savoir: la LPP (Loi sur la prévoyance professionnelle) ne contient que des règles minimales. Comprenez qu’elle ne traite que de la prévoyance obligatoire, qui doit permettre de toucher, avec l’AVS et pour quelqu’un qui a cotisé toute sa vie professionnelle, une retraite à vie correspondant à environ 60% du salaire assuré.
La notion de salaire assuré est assez difficile à comprendre. La loi prévoit en effet que seule la partie du salaire variant entre 24 120 fr. et 72 360 fr. (*) est assurée. C’est ce qu’on appelle le salaire coordonné. Cela revient à dire que (voir schéma page 29):
• la cotisation au 2e pilier sera calculée en fonction d’une somme maximale de 48 240 fr. (72 360 - 24 120) et d’un montant minimal de 3015 fr. (*);
• au-dessous de 24 120 fr., pas besoin de 2e pilier, puisque c’est l’AVS qui couvrira une rente égale à au moins 60% de l’ancien salaire;
• et au-delà de 72 360 fr., il faut une prévoyance professionnelle surobligatoire (lire encadré ci-contre) si l’on veut garder comme objectif de toucher, à sa retraite, une rente correspondant à 60% de son ancien salaire, voire plus.
Deux exemples fictifs:
• Roger touche un salaire annuel de 65 000 fr. Il va cotiser sur un salaire coordonné de 40 880 fr. (65 000 - 24 120) et touchera, à sa retraite, une rente annuelle d’environ 39 800 fr. (AVS incluse), ce qui correspond à un peu plus de 60% de son salaire.
• Thérèse touche un salaire annuel de 110 500 fr. Elle va cotiser sur un salaire coordonné maximal de 48 240 fr. et touchera, à sa retraite, une rente annuelle d’environ 44 320 fr. fr. (AVS incluse), ce qui correspond à environ 40% de son salaire. Si elle veut plus, il lui faut une prévoyance complémentaire (2e pilier surobligatoire ou contracter un 3e pilier).
Rente de vieillesse
Les rentes de vieillesse s’obtiennent normalement à partir de 65 ans pour les hommes, 62 ans (mais vraisemblablement 63 ans dès 2001 et 64 ans dès 2004, peut-être même 65 ans dès 2009) pour les femmes.
Le calcul de leur montant est assez complexe. Il tient compte du total des cotisations (versées par l’employé et l’employeur), «bonifiées» de 7 à 18% selon les tranches d’âge et créditées d’un intérêt annuel de 4% (*). La rente annuelle correspondra à 7,2% du total obtenu. Chaque caisse doit fournir chaque année une attestation qui mentionne les prestations acquises et le montant projeté de cette rente.
Si, à l’âge de la retraite, l’assuré a des enfants à charge, c’est-à-dire âgés de moins de 18 ans ou en apprentissage/études (moins de 25 ans), ou encore des enfants invalides aux deux tiers au moins, il a droit à une rente complémentaire équivalant à 20% de sa propre rente (pour chaque enfant).
Rente d’invalide
Les rentes d’invalide sont déterminées par les règles appliquées par l’AI: un assuré y a droit s’il n’est pas à la retraite et s’il a subi une incapacité de gain de 50% au moins durant un an (parfois deux, mais seulement s’il y a une assurance perte de gains) sans interruption.
Le calcul de leur montant est encore plus compliqué que celui des rentes vieillesse. Il tient compte du total des cotisations versées au moment de l’accident, «bonifiées» comme si l’assuré avait cotisé jusqu’à la retraite, mais sans intérêt depuis la date de l’accident. La rente annuelle correspondra à 7,2% du total obtenu si l’invalidité est de 2/3 au moins, la moitié si elle est de 50% au moins. Chaque caisse doit chaque année fournir une attestation qui mentionne le montant projeté de cette rente si l’accident arrivait au moment où on la reçoit.
Si, lors de l’accident l’assuré a des enfants à charge (lire ci-contre), il a droit à une rente complémentaire équivalant à 20% de sa propre rente (pour chaque enfant).
Rente de survivant
Les rentes de survivant sont dues lorsque le défunt était assuré (il cotisait encore) ou s’il était à la retraite ou invalide (il touchait des prestations) au moment du décès.
Le montant de base correspond à la rente d’invalide (lire ci-contre) que l’assuré aurait touché s’il était devenu invalide plutôt que de décéder, ou à la rente vieillesse s’il était à la retraite.
La veuve aura droit à une rente correspondant à 60% de la rente concernée, mais seulement si elle a au moins un enfant à charge, ou si elle a atteint l’âge de 45 ans et que la mariage a duré au moins cinq ans. Si elle ne remplit aucune de ces deux conditions, elle a droit à une allocation unique égale à trois rentes annuelles.
La femme divorcée est assimilée à la veuve en cas de décès de son ancien mari, pour autant que le mariage ait duré 10 ans au moins et qu’elle ait bénéficié, en vertu d’un jugement, d’une rente ou d’une indemnité en capital en lieu et place d’une rente viagère.
Le veuf ou l’homme divorcé n’a droit à aucune prestation (même si le projet de révision prévoit de rectifier cette inégalité)!
Chaque enfant à charge a droit à une rente d’orphelin correspondant à 20% de la rente d’invalidité ou de vieillesse.
Christian Chevrolet
(*)Chiffres valables en 2000. Les rentes d’invalide et de survivant sont obligatoirement adaptées tous les trois ans, jusqu’à l’âge de la retraite. Leur adaptation après l’âge de la retraite, tout comme celle des rentes de vieillesse, est «recommandée», selon les possibilités financières de l’institution de prévoyance.
assurance complémentaire
2e pilier surobligatoire
Certaines caisses de pension (notamment celles des fonctionnaires fédéraux et cantonaux, des banques et des grandes entreprises) proposent à leurs assurés d’«améliorer» leur retraite largement au-delà de ce que la loi a prévu, grâce à une prévoyance professionnelle complémentaire, aussi appelée surobligatoire (voir schéma p. 29). La cotisation — complémentaire, elle aussi... — est le plus souvent paritaire (moitié pour l’employé, moitié pour l’employeur), mais pas forcément. La LPP ne régit en effet que l’assurance obligatoire. Et attention: la caisse peut émettre des réserves par rapport à l’état de santé (à cause
des indemnités d’invalide et de survivant), mais seulement pour la partie surobligatoire.
Si une caisse ne propose pas une telle complémentarité, l’assuré peut se diriger vers un 3e pilier, c’est-à-dire l’épargne individuelle. Nous y reviendrons plus tard.
Prochain article
Troisième étape de notre parcours dans notre prochaine édition, où nous aborderons la question du financement (cotisations) et de la coordination du
2e pilier avec les autres assurances sociales.