Une demande de changement de nom doit se fonder sur de «justes motifs», indique laconiquement le Code civil (art. 30 CC). C’est dire si la marge d’interprétation des autorités compétentes est large. Les juges ont néanmoins précisé ce qu’il faut entendre par «justes motifs». Ainsi, les enfants de parents divorcés ne peuvent simplement prétendre porter le nom de la mère qui en a la garde lorsque celle-ci a repris son nom de jeune fille ou qu’elle a adopté celui de son nouveau mari. Pour abandonner le nom de leur père, ils devront convaincre les juges que ce patronyme leur cause de gros ennuis.
Le Tribunal fédéral (TF) vient de confirmer cette ligne de conduite (1). Il a rejeté la demande de deux garçons de 11 et 13 ans, qui affirmaient que le nom de leur père était lourd à porter, en raison des mauvaises relations qu’ils entretenaient avec leur géniteur. Des motifs insuffisants aux yeux des juges, qui précisent que seuls des critères objectifs entrent en ligne de compte. En clair, il faudrait que le nom porte un sérieux préjudice à l’enfant.
Dans une situation semblable, le TF vient cependant de rendre une décision inverse (2). En contradiction (du moins apparente) avec sa jurisprudence, il a accepté qu’une fillette née hors mariage prenne le nom du père (avec qui elle vit), abandonnant de ce fait celui de sa mère. Il est vrai que les parents s’étaient quittés lorsque leur fille n’avait que deux ans et qu’ils s’étaient mariés chacun de leur côté.
En l’absence de préjudice, cette situation n’était pas de nature à motiver le changement de nom. En fait, les juges ont appliqué un article de loi selon lequel «l’enfant dont la mère n’est pas mariée avec le père (et qui) est élevé sous l’autorité parentale du père (…) reçoit l’autorisation de prendre le nom de famille de ce dernier» (art. 271 al. 3 CC).
A la réflexion, cette décision est cohérente puisqu’un enfant né hors mariage placé sous l’autorité parentale de sa mère porte automatiquement le nom de celle-ci.
Suzanne Pasquier
(1)Arrêt du 26 juin 2006, 5C.9/2006
(2) Arrêt du 22 mai 2006, 5C.7/2006
de cas en cas
Des solutions diverses
En dehors du cas de changement de nom pour «justes motifs» (évoqué ci-dessus), voici comment se règlent les principales situations familiales atypiques.
> Enfant né hors mariage vivant avec sa mère – Il porte le nom de sa mère, même si elle vit en concubinage avec le père ou si elle se marie avec un autre homme. En cas d’autorité parentale conjointe, l’enfant ne peut pas non plus porter le nom de son père.
> Enfant vivant avec sa mère divorcée – Il garde le nom de son père, même si sa mère reprend son nom de jeune fille ou se remarie. Font exception les rares cas où le couple avait été autorisé à choisir le nom de l’épouse comme nom de famille.
> Enfant né hors mariage vivant avec son père – Il garde le nom de sa mère, reçu à la naissance. Il peut demander à porter le nom de son père s’il est placé sous la seule autorité parentale de ce dernier.