Le suicide est tabou. Les conséquences qu’il engendre au niveau des assurances le sont tout autant. Pourtant, celui qui tente intentionnellement de mettre fin à ses jours encourt des pénalités, soit pour ses proches en cas de décès, soit pour lui-même en cas d’échec.
En cas de mort
Si la tentative aboutit, la veuve ou l’orphelin ne sont pas pénalisés par les assurances sociales. Cela, toutefois, pour autant qu’ils n’aient pas intentionnellement poussé le défunt à commettre un tel acte, en lui mettant, par exemple, une arme dans la main, alors que ses penchants morbides étaient connus, ou encore en l’encourageant par des paroles. Si tel est le cas, une diminution, voire même, dans le pire des cas, une suppression de la rente de survivants AVS est alors possible. Dans la pratique toutefois, l’Office fédéral des assurances sociales indique ne pas avoir connaissance de l’application d’une telle restriction à ce jour.
Conclure une assurance vie, peu avant de mettre fin à ses jours, dans le dessein de mettre sa famille à l’abri du besoin, n’est pas une bonne idée. Les assureurs privés sont en effet tenus de prévoir un délai de carence de trois ans dans leurs conditions générales. En clair, si la mort par suicide intervient au cours des trois premières années d’assurance, seule la réserve mathématique d’inventaire – soit le montant des cotisations déjà versées plus les intérêts – est restituée.
Passé ce délai, les compagnies garantissent l’entier des prestations conclues dans le contrat. Attention toutefois: légalement, l’assureur n’est pas tenu de verser lesdites prestations si l’assuré a causé intentionnellement le sinistre. Elles pourraient donc, si elles le souhaitent, édicter des conditions générales plus restrictives.
Tentative de suicide
En cas de suicide manqué, l’assuré peut avoir besoin de soins ou, pire encore, devenir invalide. Qui prendra alors en charge les traitements? Les prestations seront plus ou moins généreuses selon que la tentative de suicide constitue un accident ou une maladie. Dans la plupart des cas, l’assurance accidents refuse la prise en charge, explique Thierry Vauthey de l’OFSP (lire encadré). La caisse maladie ne pouvant réduire ses prestations en cas de faute grave commise par l’assuré, c’est donc elle qui assume les frais.
De son côté, l’AI ne peut en principe refuser ou réduire ses prestations, puisqu’elle est censée garantir les moyens d’existence des personnes invalides, quelle que soit l’origine de l’atteinte à leur santé. Une exception toutefois: si l’assuré a provoqué son invalidité par sa faute, en déguisant par exemple en suicide une automutilation afin d’obtenir des prestations.
Quant aux assureurs vie, ils refusent la plupart du temps la libération du paiement des primes ou le versement d’indemnités pour perte de gain lorsque l’assuré a tenté de mettre fin à ses jours.
Quid des caisses de pension?
Les caisses de pension, enfin, sont autorisées à diminuer les rentes invalidité seulement si l’AI les a réduites aussi, et dans les mêmes proportions. Attention: cette clause ne vaut que pour la part obligatoire du 2e pilier. Pour la part surobligatoire, les caisses sont libres de fixer leurs conditions. Aucun règlement de caisse ne prévoit toutefois une telle restriction, selon l’OFAS.
Accident ou maladie?
Lorsqu’une tentative manquée requiert des soins médicaux, les assureurs doivent tout d’abord déterminer s’il s’agit d’une maladie ou d’un accident. Si, au moment des faits, l’assuré était incapable de discernement, on considère que c’est un accident. Mais, il faut pour cela qu’une maladie psychique ou un grave trouble de la conscience soient établis (folie, hallucination, stupeur profonde, etc.). Un simple geste disproportionné, dans un moment de dépression ou de désespoir, ne suffit pas, selon le Tribunal fédéral.
Dans tous les autres cas, on considère que l’acte était intentionnel. C’est alors la caisse maladie qui prend les frais en charge.