Séduite par une publicité pour les pastilles Xtra Slim, un «nouveau produit mange-graisse d’une efficacité totale», Christiane Ricou en commande une boîte. Le «prix choc» de la cure l’est réellement: 159 fr. plus 6,95 fr. de frais de port! Trois jours plus tard, souffrant de problèmes digestifs, notre lectrice genevoise renvoie le flacon, mais paie la facture par erreur, ce dont elle avertit l’entreprise.
C’était il y a cinq mois. Depuis, Christiane Ricou n’a pas reçu de nouvelles. Ni d’attestation de remboursement, malgré ses trois lettres recommandées et le «certificat de garantie totale» imprimé sur la facture, assurant aux clients qu’ils n’auront rien à payer s’ils renvoient le produit avant trente jours.
Boîtes fantômes
Notre lectrice risque d’attendre en vain. Elle a en effet été la victime trop crédule d’une des innombrables «sociétés fantômes» dont les publicités envahissent nos boîtes aux lettres. Toutes proposent des produits miraculeux et usent des mêmes arguments pseudo-scientifiques et totalement mensongers. Celle qui vend les pilules Xtra Slim s’appelle Distrapool, et réside soi-disant à Thônex. Mais en lisant ses multiples pages de publicité, on s’aperçoit qu’elle se nomme aussi Institut naturel diététique (à Thônex) ou Naturlab RB &M Research (à Pfäffikon). Est-il utile de le préciser? Aucun institut de ce nom n’est inscrit à ces adresses!
Autre surprise: le numéro de commande aboutit à une centrale travaillant pour diverses entreprises, laquelle n’a qu’une adresse e-mail pour contacter Distrapool! «Nous avons d’abord cru qu’ils avaient de la peine à gérer leur paperasse, nous déclare notre interlocutrice au call-center. Mais nous avons reçu de nombreux coups de fil de clients mécontents. Nous allons donc parler du problème lors de notre prochaine réunion.»
Les autorités impuissantes
Face à ce genre de situation, les autorités responsables – les pharmaciens cantonaux concernés et l’institut suisse des produits thérapeutiques Swissmedic – réagissent en général de façon standard en demandant à la firme de mettre un terme à la commercialisation du produit.
Martine Follonier, adjointe du pharmacien cantonal genevois, s’est penchée sur le cas de Christiane Ricou. Elle a écrit à Distrapool, en faisant remarquer que selon les indications thérapeutiques, son produit est un médicament. Il ne peut donc être vendu sans autorisation de mise sur le marché. Par ailleurs, la vente par correspondance de médicaments est limitée aux pharmacies, sous certaines conditions. «S’ils continuent leur activité, on les dénoncera à Swissmedic.»
Le problème, c’est qu’il est difficile de trouver qui se cache derrière un nom ou un numéro de boîte postale. Et comme les analyses sont souvent complexes, seuls les produits supposés problématiques sont envoyés à un laboratoire.
Martine Follonier a toutefois évalué les ingrédients figurant dans la composition des pilules achetées par notre lectrice. Et elle ne comprend pas ce qui a pu provoquer les problèmes digestifs: «L’orthosiphon a des propriétés diurétiques. On mentionne aussi du “garnicia”, mais il doit s’agir de “garcinia”, dont il existe plusieurs espèces dont une est laxative et l’autre inhibitrice de graisse. Je ne sais pas laquelle a été utilisée. Il pourrait aussi y avoir des substances non déclarées!»
Quoi qu’il en soit, ces pastilles sont des médicaments et Distrapool devrait avoir une autorisation pour les commercialiser. Afin de mettre le public en garde contre ce genre de marché douteux, le service de protection des consommateurs à Berne donne donc deux conseils:
> ne jamais acheter un médicament par correspondance;
> demander l’avis d’un médecin ou d’un pharmacien pour tout produit inconnu.
Véronique Kipfer
Vendeurs au tribunal
Prescription trop courte
Suite à une plainte de la FRC (Fédération romande des consommateurs) en 1998, quatre vendeurs de produits soi-disant minceurs (Befosan, DMS, Infogest et la Société niçoise de marketing), ont été jugés au Tribunal d’arrondissement de Nyon le 25 septembre. Reconnus coupables de vente sans autorisation, ils ont toutefois été acquittés, bénéficiant du délai de prescription qui, dans le canton de Vaud, n’autorise un jugement que dans les deux ans après le dépôt de plainte.
D’autre part, le tribunal n’a pas reconnu d’infraction à la loi sur la concurrence déloyale, car un arrêté fédéral certifie que les produits illicites n’y sont pas soumis. L’Etat de Vaud conserve néanmoins les 370 000 fr. séquestrés, et les sociétés devront payer des créances compensatoires. La FRC va déposer un recours contre ce jugement, et le Parquet va s’attaquer au délai de prescription, estimé trop court.