Le monde du DVD est fait de zones, de «dézonage» et de codes. Un glossaire obscur que les adeptes du home cinema maîtrisent à la perfection. Ils savent donc qu’un lecteur «multizones» est capable de lire n’importe quel DVD: un «zone 1», un «zone 2», «zone 3», etc.
Car les films font l’objet d’une distribution géographiquement ciblée. Chaque DVD est équipé d’un code régional qui le rend illisible pour les appareils qui ne sont pas de «sa» zone. Destinés au marché américain, les DVD zone 1 sont les premiers à être diffusés; les «zone 2», eux, n’arrivent en Europe qu’un an plus tard en moyenne. Mais certains lecteurs DVD, dits «multizones», se jouent de cette chicane électronique. En Suisse romande surtout, nombre de cinéphiles sont ravis de pouvoir ainsi profiter des sorties avant leurs camarades de zone. Et l’importation de «zone 1» représente une part non négligeable du marché des DVD.
Olivier Matthews ne comprend donc pas pourquoi son lecteur Toshiba multizones refuse depuis quelque temps de jouer certains DVD «zone 1». «Il paraît que les fabricants ont changé leur formatage pour se protéger du piratage, raconte notre lecteur de Bernex. Est-ce vrai?»
Sus aux «pirates»
Directeur du DVD-Forum suisse (plate-forme d’information et de communication regroupant les principales entreprises de com-
mercialisation de disques et de lecteurs DVD), Albrecht Gasteiner confirme: «Pour contrer le contournement des codes régionaux, Warner Home Video et Columbia Tristar équipent désormais leurs dernières sorties en code 1 d’une version améliorée du code. Ce système, appelé RCE (Regional Code Enhanced), peut déceler les lecteurs «dézonés»; dans ce cas, au lieu du film, apparaît sur l’écran un message selon lequel le DVD est incompatible avec le lecteur.»
Dézonage
«Le concept de marketing hollywoodien est basé sur une diffusion des films étalée dans le temps, explique Albrecht Gasteiner; l’industrie du divertissement est très à cheval sur l’application de ce concept.» Les DVD zone 1 équipés du RCE sont toutefois en nombre restreint. Selon M. Gasteiner, «Columbia et Warner n’indiquent pas quels DVD sont modifiés, et on ne sait pas non plus si d’autres studios ont adopté le RCE. Manifestement, on tient à laisser les hackers dans le flou…».
Ces «pirates» (qui ne font rien d’autre qu’acheter et utiliser un matériel parfaitement légal…) pourront toujours essayer ce truc, confié par la responsable d’une boutique de location vidéo: introduire un DVD zone 1 non codé RCE, appuyer sur play, puis l’éjecter et immédiatement introduire le DVD codé. Il paraît que ça marche… souvent. Blaise Guignard
la géographie commerciale selon hollywood
Un découpage très stratégique
La distribution des DVD par zones et leur codage obéit à la logique commerciale: le DVD est né de l’union des studios hollywoodiens et des fabricants d’électronique de loisir japonais au début des années 90, décidés à créer un support vidéo capable de faire mieux que la VHS pour diffuser l’Evangile hollywoodien. Calibré comme un CD (12 cm de diamètre, un grand succès populaire), le nouveau «disque numérique versatile» (multi-usages) a été assorti de strictes règles commerciales, afin d’éviter que cette percée de l’industrie du divertissement dans le salon des particuliers ne se transforme en autogoal. D’où les six régions ci-contre définies pour la diffusion:
1. USA, Canada,
2. Europe, Japon, Moyen-
Orient, Afrique du Sud,
3. Orient, Japon exclu,
4. Amérique du Sud, Océa-
nie,
5. Afrique (sauf Afrique du
Sud), Russie, sous-conti-
nent indien,
6. Chine.