Depuis juillet, un litre d’alcool pur est taxé de 29 francs, qu’il s’agisse d’un produit indigène ou étranger. Avant, la taxe sur les alcools suisses s’élevait à 26 fr./l, alors que les produits étrangers étaient taxés entre 32 et 58 fr./l d’alcool pur.
Cette unification de l’impôt laissait présager des baisses pouvant aller jusqu’à 8 fr. sur une bouteille de 7 dl d’alcool à 40 degrés. La diminution effective n’est pas toujours aussi importante. Mais bien des produits étrangers sont désormais moins chers.
Une petite enquête chez quatre détaillants (voir tableau ci-dessous) montre que les spiritueux les plus taxés auparavant sont ceux dont les prix ont le plus fondu: une bouteille de vodka Smirnoff coûte ainsi un quart moins cher. Plus frappant encore, les nouveaux prix du Cointreau, Bacardi, Rémy Martin ou encore du gin et du whisky, jusqu’à moitié moins chers. «Commerces et consommateurs profitent non seulement de la baisse des taxes, mais aussi d’autres diminutions, note Peter Kaul, porte-parole de Denner. Car les importateurs ont également adapté au niveau européen les tarifs suisses – autrefois élevés – de nombreux spiritueux.»
Toutefois, les importateurs n’ont pas agi par altruisme. Comme l’explique Markus Meny, manager chez Pick Pay: «Il aurait soudain été intéressant pour les détaillants d’acheter directement en Europe, en contournant les importateurs.» Pour prévenir cette perte de parts de marché, les importateurs ont donc revu leurs prix à la baisse.
Vaud en avance
Contrairement aux détaillants, rares encore sont les cafetiers qui font bénéficier le client des nouveau prix. «Chaque restaurateur est responsable de ses prix», tente d’expliquer Hans Peyer de Gastrosuisse. Pour des «raisons psychologiques» il serait certes plus juste de répercuter la baisse sur le client, admet-il. Mais le prix du produit ne constitue qu’un tiers des frais occasionnés par un schnaps servi au comptoir. Il serait donc difficile, toujours selon M. Peyer, de calculer la baisse exacte des prix. Ce qui semble n’avoir pas constitué une difficulté insurmontable pour la Société vaudoise des cafetiers, restaurateurs et hôteliers: elle a fourni une nouvelle tabelle des prix des alcools forts, entrée en vigueur au 1er septembre. Toutefois, chaque tenancier est libre de l’appliquer ou non.
Toujours selon M. Peyer de Gastrosuisse, «les clients ne boivent pas plus parce que les prix sont plus bas». Postulat qui ne s’est pourtant pas vérifié lors du petit sondage dans le milieu de la gastronomie effectué par notre partenaire alémanique K-Tip. Jürg Wartmann, directeur du bar bâlois Des Art’s, a par exemple réduit de 25% à 30% le prix des boissons fortes les plus vendues: «Nous gagnons moins par verre, mais le chiffre d’affaires a augmenté, et compense largement la diminution de nos marges.»
Helmuth J. Koch, directeur de Bindella, propriétaire de 32 établissements publics, a entièrement répercuté les nouveaux prix en faveur de ses clients. Il avoue même en avoir profité pour lancer une offensive sur les tarifs des spiritueux afin de gagner de nouveaux clients.
Quant à Beat Sigg, patron du bar zurichois Widder, il a baissé de 2 fr. le prix du Johnnie Walker et du Bailey’s. «Il ne serait pas équitable de ne pas faire profiter nos clients des nouveaux prix. Quand le prix du café ou de l’essence baissent, on le répercute aussi sur le consommateur.»
Monsieur Prix et Gastrosuisse se disputent encore pour savoir combien parmi les 22 000 restaurateurs du pays ont adapté leurs prix. Vu le nombre de réclamations de clients fâchés que reçoit le surveillant des prix, «il est certain que, pour l’heure, la branche ne bouge pas beaucoup», déplore Rudolf Lanz, porte-parole de Monsieur Prix. Celui-ci accorde aux restaurateurs retardataires un dernier délai jusqu’à fin septembre.
Une menace peu goûtée par Gastrosuisse: «Nous nous demandons dans quelle mesure il est habilité à nous dic-
ter des règles», commente Hans Peyer. Réplique de Werner Marti: «Si le marché et la concurrence fonctionnent vraiment dans la situation actuelle, les prix devront baisser sur un large front.» Affaire à suivre.
Comparaison des prix des commerces de détail
7dl/40% volume d’alcool
Avant Après Différ. Avant Après Différ. Avant Après Différ. Avant2 Après2 Différ.
Whisky Ballantines 39.90 20.95 –47,5% 38.25 19.45 –49% 40.37 21.89 –46% 42.30 23.70 –44%
Vodka Smirnoff 26.90 19.95 –26% 24.20 18.95 –22% 26.24 19.79 –24,5% 28.95 21.90 –24%
Rémy Martin VSOP 67.90 43.50 –36% 67.40 42.40 –34,5% 66.49 42.50 –36% 81.50 49.50 –39%
Ron Bacardi1 Superior 34.95 22.90 –34,5% 32.30 19.75 –39% 33.26 22.50 –32,5% 41.30 27.40 –34%
Gin (Gordon’s London Dry)1 31.90 18.90 –41% 31.95 17.95 –44% 32.90 18.59 –43,5% 38.20 18.40 –52%
Cointreau 39.95 26.90 –33% 38.85 23.45 –40% 40.45 25.99 –36% 47.50 31.40 –34%
137,5% volume d’alccol. 2Recommandation de prix du grossiste aux détaillants Primo. Prix: Etat août 1999