En décembre dernier, Patrice Brasey achète un sac de 5 kg de farine prête à l’emploi pour pains aux graines, au cercle des agriculteurs, à Satigny (GE). Habitué des poids et des mesures, ce pharmacien décide de diviser le contenu en dix parts égales de 500 g, chaque portion correspondant à la quantité nécessaire pour la confection d’un pain. A la dixième pesée, les choses se gâtent. La balance affiche 250 g. Au total, le sac contient donc seulement 4750 g et non pas 5 kg de farine.
Une poignée d’eau
A Swissmill, la minoterie d’où provient ce paquet, Karl Lorenz, responsable marketing, rejette l’idée d’une erreur au moment de la pesée. «Lorsque nous conditionnons la farine, elle présente un taux d’humidité de 14,5% et un poids moyen de 1005 g (valeurs conformes à l’art. 40 de l’Ordonnance sur les denrées alimentaires). Les différences de poids qui apparaissent ensuite relèvent de phénomènes physiques. La farine absorbe ou rejette en effet de l’humidité selon l’humidité de l’air et la température ambiante. Ainsi, lorsque l’air est sec, elle peut perdre jusqu’à 5% de son humidité, ce qui représente une perte de poids de 50 g par kilo.»
Contrairement au grand public, les boulangers connaissent bien ce phénomène. «En été, la farine est plus sèche, elle perd de son volume. A l’inverse, lorsqu’il pleut beaucoup, la farine se charge d’humidité et son poids augmente», explique Yves Girard, secrétaire patronal de l’Association des boulangers vaudois. D’autres produits connaissent ces fluctuations. Les pâtes sèches, par exemple, peuvent perdre jusqu’à 2% de leur masse. Le poids
du sucre et du sel, en revanche, varie très peu.
Pesées à l’appui
Afin de mesurer l’étendue du phénomène, la rédaction de Bon à Savoir a acheté et fait peser immédiatement quatre paquets de farine fleur d’un kilo dans trois commerces. Auparavant, elle a pris soin de transvaser leur contenu dans un sac en plastique. Les mesures ne tiennent pas compte de ce sac de 8 g.
Avec 1002 g de farine, le paquet de Denner obtient le meilleur score. Puis suivent ceux de Coop Natura Plan (992 g), de Migros Engagement (988 g) et enfin de Coop Prix Garantie (979 g).
Deux semaines plus tard, après avoir été entreposés dans les bureaux de la rédaction, le produit de Denner avait perdu 9 g, ceux de Coop Natura Plan et de Migros Engagement, 13 g, et celui de Coop Prix Garantie, 7 g.
Pour limiter l’évaporation:
> Stocker le paquet de farine dans une boîte en plastique hermétique et la consommer dans les 2 à 3 mois.
> Acheter des sacs de 25 kg. Plus le paquet est grand, moins les risques d’évaporation sont élevés. Une solution, il est vrai, peu pratique...
> Augmenter ou au contraire réduire la quantité d’eau au moment de la préparation du pain. Exemple: si un paquet contient 950 g de farine au lieu d’un kilo, on peut ajouter 50 g d’eau aux quantités prévues par la recette.
Patrice Brasey, notre lecteur amateur de pain fait maison, aurait bien une autre solution à proposer aux minoteries: emballer la farine dans des sacs plastique étanches. «Impossible», répond Pascal Favre, responsable de la meunerie des Grands Moulins de Cossonay. «La condensation entraînerait un risque élevé de moisissure. Par ailleurs, les coûts d’emballage seraient trop élevés.» Marisa Dürst