Pour des raisons commerciales évidentes, les fabricants d’appareils ont besoin de contrôler la durée de vie de leur produits en l’ajustant de la manière la plus précise possible: trop courte, elle provoque le mécontentement du client – susceptible de passer à la concurrence lors du remplacement de l’article –, trop longue, elle péjore les chiffres de vente…
Les ingénieurs ont donc mis au point divers stratagèmes et dispositifs pour provoquer la mise hors service des équipements domestiques.
Carte électronique
Pratiquement tous les appareils, même les plus basiques, sont à présent munis d’une carte électronique destinée à en gérer le fonctionnement. La méthode d’autodestruction la plus simple est donc d’implanter dans cette carte un compteur d’heures ou de cycles, qui provoquera une panne après un certain temps d’utilisation. Un tel dispositif est quasi impossible à déceler, et, seuls quelques cas ont pu être prouvés.
En mars 2009, dans un article intitulé «La courte vie des imprimantes», Bon à Savoir avait déjà révélé le cas de ces objets. Après un certain nombre de copies, elles affichent souvent le message «Réservoir d’encre usée plein, contacter votre service après-vente», et cela quel que soit le niveau réel du réservoir en question. Dans ces cas heureusement, une petite recherche sur internet permet, le plus souvent, de trouver l’astuce pour remettre le compteur à zéro.
Cycles de charge
Les appareils, surtout électroniques, mais aussi de plus en plus électroménagers, ont recours à des accumulateurs pour assurer leur fonctionnement autonome. Ce domaine des batteries est extrêmement bien connu des chercheurs, qui en ajustent la durée de vie, ou le nombre de cycles de charge/décharge, de manière très précise. Exemple: alors que le nombre de cycles usuels d’un bon accumulateur lithiumion est de 500 à 1000, ceux qui équipent les téléphones portables rendent l’âme après seulement 100 à 300 cycles! A l’achat d’un appareil fonctionnant avec un accumulateur, les consommateurs doivent donc veiller à ce que ces derniers puissent être changés, si possible par l’utilisateur, et que leur disponibilité soit assurée.
La faute à l’utilisateur
Les interventions décrites plus haut irritent un nombre grandissant de consommateurs et leur font douter des bienfaits censés être apportés par le progrès technologique.
Une méthode plus sophistiquée consiste donc à préprogrammer des pannes, qui seront ensuite déclenchées par une erreur de manipulation ou une négligence, généralement anodines, de l’utilisateur lui-même. L’objectif: ce dernier doit se sentir responsable de la destruction de son appareil et ne pas songer à incriminer le fabricant!
Les exemples sont nombreux et ont déjà été révélés à de moults reprises dans nos colonnes: vulnérabilité aux chocs, même légers, pour les appareils photo; à l’humidité, pour les téléphones portables. A l’heure actuelle, quelques gouttes de pluie suffisent à les détruire irrémédiablement, alors que, dix ans plus tôt, un Natel – ou tout autre appareil électronique – survivait à une immersion complète après avoir été soigneusement séché.
Appel à un technicien
Toujours dans le but de culpabiliser l’utilisateur, les thermofusibles sont de discrets générateurs de panne. Ces petits cylindres d’environ 15 mm de long pour 5 mm de diamètre, installés dans la quasi-totalité des appareils munis d’un corps de chauffe, stoppent leur fonctionnement en cas de surchauffe. Ainsi, celui qui oublie de mettre de l’huile dans la friteuse ou laisse son four allumé trop longtemps, ne pourra plus l’utiliser sous prétexte de lutte contre les possibles incendies. Bien entendu, la remise en fonction de l’appareil nécessite l’intervention d’un technicien, alors que, jusque dans les années 1980, les sécurités thermiques étaient simplement réenclenchables par l’utilisateur.
Laurent Zahn