Depuis la révision du Code civil en 2013, toute personne majeure peut prendre ses dispositions au cas où elle perdrait sa capacité de discernement, notamment parce qu’elle est tombée dans le coma ou la démence. Cela consiste principalement à désigner quelqu’un de confiance qui la représentera tant sur le plan tant personnel qu’administratif et judiciaire, lorsqu’elle ne sera plus capable de défendre elle-même ses intérêts.
Pour autant que les choses aient été faites dans les règles (lire plus loin), le «mandat pour cause d’inaptitude», puisque tel est son nom, ne peut être contesté et son auteur est donc certain de ne pas être mis sous curatelle. Bref, un document de première importance dont certain était persuadé qu’il allait rencontrer un franc succès.
Or, selon un sondage commandé par Pro Senectute et publié le mois dernier, 23% des Suisses savent de quoi il s’agit et 25% en ont déjà entendu parler. Faites le compte: il en reste 52% qui en ignorent son existence. Et c’est pire encore en Suisse romande, où deux tiers des gens ne savent pas de quoi il s’agit! A ce taux-là, évidemment, très peu en ont écrit un: 12% sur l’ensemble de la Suisse, mais 5% seulement en Romandie!
Voilà pourquoi Bon à Savoir propose désormais un dossier contenant non seulement les instructions nécessaires à sa rédaction, mais aussi un modèle, qui devra être modifié en fonction des besoins (lire page ci-contre).
Ce que la loi prévoit
Le mandat pour cause d’inaptitude permet donc de désigner celui ou ceux qui prendront les décisions que le mandant ne peut plus prendre, faute de discernement. Comme cette ou ces personnes auront un pouvoir considérable, elles ne recevront un acte officiel faisant état de leurs droits que lorsqu’une instance cantonale – l’Autorité de protection de l’adulte – aura vérifié que le mandant est effectivement incapable de discernement, qu’il avait cette capacité lorsqu’il a rédigé le mandat, que les critères de forme sont respectés, que l’individu désigné accepte la tâche, etc.
La loi prévoit que ce dernier pourra:
⇨ fournir une assistance personnelle: ouverture du courrier, suivi des soins et des traitements médicaux, relation avec un home, acceptation ou refus d’héritage, etc;
⇨ gérer le patrimoine: trafic de paiement, échanges avec les banques, placements de fortune, etc;
⇨ représenter le mandant dans les rapports juridiques avec des tiers: contrats avec les assurances ou d’autres sociétés, demandes de prestations sociales, déclaration d’impôt, représentation face aux autorités et aux tribunaux, etc.
À qui déléguer?
Le mandant peut très bien confier telle tache à un proche et telle tache à quelqu’un d’autre. Il convient alors d’être très précis dans la répartition du travail et de veiller à ce que tous les protagonistes s’entendent bien car, sinon, la situation risque de devenir cauchemardesque!
Les personnes proposées doivent être majeures, mais peuvent aussi être morales (banque, fiduciaire). Elles ne sont pas obligées d’accepter leur désignation et peuvent demander la résiliation en cours de contrat. Il faut donc non seulement s’assurer qu’elles sont disposées à assumer les tâches dévolues, mais leur prévoir des remplaçants en cas de désistement.
Tout comme un testament, la forme olographe – document entièrement écrit à la main – est obligatoire. La forme dactylographiée est admise si le document est authentifié par un notaire. Et, dans tous les cas, il doit être localisé, daté et signé.
Sans mandat
Les couples mariés ou enregistrés peuvent se représenter mutuellement sans mandat pour cause d’inaptitude. Selon la loi, ils doivent, toutefois, faire ménage commun ou se fournir une assistance personnelle régulière. Et attention: cela n’est possible que pour les actes juridiques habituellement nécessaires pour satisfaire les besoins du conjoint incapable de discernement, soit l’administration ordinaire de ses revenus et la gestion de sa correspondance. Pour les actes juridiques relevant de l’administration extraordinaire des biens, par exemple une vente immobilière, ils doivent être désignés par un mandat pour cause d’inaptitude ou requérir le consentement de l’Autorité de protection de l’adulte.
Sans mandat et sans conjoint officiel, cette même autorité va tenter de désigner un membre de la famille comme représentant, mais si cela n’est pas possible, elle instituera une curatelle externe.
Christian Chevrolet