Fin de journée ordinaire à la gare de Fribourg. Dans les toilettes pour dames, deux jeunes filles ont posé leurs sacs par terre. L’une a passé un pull et se regarde dans la plaque en inox qui tient lieu de miroir. Le vêtement lui plaît, la copine approuve et le marché est conclu: un billet de 20 fr. change de main.
La scène est d’autant plus surprenante que les WC de la gare de Fribourg, bien que payants, sont loin d’être irréprochables (voir tableau). Or, pour les utilisateurs du rail, ce sont des lieux incontournables. S’il est rare qu’on y refasse sa garde-robe, ils font souvent l’objet d’un passage obligé, notamment pour les familles avec de jeunes enfants. Peut-on s’y rendre sans arrière-pensée? Pour le savoir, nous avons visité les lieux d’aisance de dix gares romandes en notant leur niveau d’équipement et de propreté (lire encadré).
Dans notre sélection, c’est ceux de Genève qui remportent la palme, suivis de près par ceux de Lausanne et de Bienne. Dans les deux villes lémaniques, les sanitaires sont gérés par une société privée, Mac Clean. L’accès y est payant (2 fr. à Lausanne et 1.50 fr. au bout du lac) tant pour les messieurs que pour les dames.
Propres et bien éclairés
A ce tarif, l’usager a droit à un service irréprochable qui le met d’emblée dans de bonnes dispositions. Les espaces sont bien éclairés et les cabines sont nettoyées régulièrement par l’employé présent en permanence. Ce dernier se charge, sur demande, d’ouvrir les toilettes pour handicapés ou d’indiquer la table à langer.
Les autres WC de notre sélection sont gérés par le département immobilier des CFF. Très bien notée, la gare de Bienne vient d’être rénovée et dispose, elle aussi, de lieux d’aisance parfaitement entretenus. Ils sont certes payants, mais propres. Seule l’odeur du petit coin réservé aux hommes n’était pas très ragoûtante.
Trois villes (La Chaux-de-Fonds, Fribourg et Sion) facturent également l’accès aux cabines. Ici, pas de personnel présent, si bien qu’il faut disposer de la monnaie nécessaire pour pouvoir se soulager. Et, là, le prix payé est loin d’être une garantie d’hygiène!
Payants mais sales
A Fribourg et à La Chaux-de-Fonds, au moment de notre passage, les secteurs pour hommes étaient particulièrement nauséabonds et mal entretenus avec des pissoirs sales, voire bouchés. A Fribourg, le sol était jonché de papiers. Les WC dames étaient un peu plus propres, mais les caissettes à monnaie à Fribourg sont vétustes. Tant et si bien que l’enquêtrice y a laissé sa pièce de monnaie...
Mieux entretenues, les toilettes sédunoises sont malgré tout peu accueillantes, car situées dans un recoin et éclairées avec une lumière bleue. Le même éclairage est utilisé à Delémont et à Fribourg pour décourager les toxicomanes. A la décharge des CFF, les gares ne sont en effet pas toujours bien fréquentées.
«Souvent, les toilettes des petites et des moyennes gares représentent les seules installations sanitaires publiques d’une commune. Des actes de vandalisme récurrents nous ont même contraints à en fermer certaines», confirme Jean-Philippe Schmidt, porte-parole des CFF. En 2011, l’ancienne régie a toutefois décidé de les rénover progressivement sur tout le territoire suisse et de les rouvrir progressivement au public.
Effluves gratuits
Dans les autres villes, les lieux d’aisance sont gratuits. S’ils restent utilisables pour les dames, l’hygiène laisse en revanche à désirer du côté des messieurs. Ceux d’Yverdon sont ainsi équipées de nouvelles cuvettes en inox, mais un pissoir est déjà cassé et le miroir est barré d’un graffiti.
On l’aura compris: les messieurs devraient s’équiper d’un pince-nez pour fréquenter les petits coins des gares. Dans ces conditions, notre équipe est arrivée à la conclusion qu’il vaut mieux, contrairement aux préjugés, aller se recoiffer dans le train, où les WC ne sont en tout cas pas pires que ceux de certaines stations.
Conseils d’hygiène
Les CFF nous ont assurés prendre ces résultats au sérieux et envisager des mesures d’amélioration nécessaires. «Notre objectif est d’offrir des installations propres. Nous entendons ainsi proposer des centres d’hygiène contrôlés et nettoyés plusieurs fois par jour dans les 30 gares les plus fréquentées de Suisse», indique Jean-Philippe Schmidt. Quant aux petites stations, elles sont nettoyées deux fois par jour.
En guise de consolation, on se souviendra que les maladies sexuellement transmissibles ne se contractent pas dans les toilettes publiques. Pour éviter le contact avec les autres germes, on essuiera la lunette ou on la recouvrira de papier avant de s’asseoir. Il est enfin conseillé de bien se laver les mains au savon avant de sortir et de prendre un papier pour utiliser la poignée en sortant. Deux accessoires presque toujours disponibles, ce qui est déjà réjouissant.
Claire Houriet Rime
Pour télécharger le tableau comparatif, se référer à l'encadré au-dessous de la photo.
EN DÉTAIL
Les critères du test
Trois journalistes de Bon à Savoir se sont rendus en train dans les dix gares de notre sélection entre 12 heures et 18 heures pour examiner les WC hommes et femmes. Ils ont, au passage, noté les toilettes du convoi selon les mêmes critères. L’examen s’est basé sur les critères suivants.
> Equipement – Nous avons dressé la liste des équipements qui devraient être présents dans tous les lieux d’aisance pour assurer un confort et une hygiène de base. Les toilettes peuvent-elles être fermées à clé? Sont-elles équipées de papier et de savon? Peut-on se sécher les mains? Les personnes à mobilité réduite y ont-elles accès? Y a-t-il un endroit où langer les bébés?
> Propreté – Les toilettes même les mieux équipées découragent le voyageur d’y aller si elles ne sont pas nettoyées régulièrement. Nous nous sommes donc assurés que la lunette était impeccable. La netteté de la cuvette, du sol (flaque, mégots ou papiers qui traînent) et du lavabo a également été notée. Le revers de la porte devait en outre être exempt de graffitis pour être bien évalué. Plus subjectif, le critère de l’odeur est néanmoins rédhibitoire pour l’usager. Il a été finalement très facile de faire la différence entre les locaux parfumés et ceux où il faut se boucher le nez pour entrer.
> La vétusté des locaux, le miroir, l’éclairage et les éventuels problèmes rencontrés avec les caissettes à monnaie n’ont, en revanche, pas fait l’objet d’une note spécifique.