La scène s’est passée fin mars 1997, dans une filiale Denner de Kirchberg (BE): «Bonjour, je suis le surveillant du magasin. Puis-je rapidement jeter un coup d’œil à votre sac?» Surpris, Didier H. ouvre son cabas et laisse le détective fouiller dans ses affaires: «Lorsqu’il a vu que je n’avais rien volé, il s’est tourné vers le client suivant.»
Monsieur H. n’est pas un cas unique. Chaque jour, les clients de Denner et d’autres magasins discount sont invités à montrer le contenu de leur sac. Mais nombre d’entre eux se demandent: «Dois-je me laisser faire?»
La réponse varie selon la situation. Les fouilles sans soupçon de vol sont interdites en soi, car elles enfreignent le droit de la personnalité du consommateur. «Les contrô-les ne sont acceptables que là où un panneau d’avertissement est posé de façon visible à l’entrée du magasin, explique le professeur de droit Hans-Michael Riemer. En tel cas, on peut supposer qu’en entrant,
le client accepte un éventuel contrôle.»
Des avertissements nclairs pour tous
«En revanche, poursuit le juriste, des contrôles occasionnels, signalés par des panneaux peu clairs ou placés près des caisses, sont illicites. Arrivé à cet endroit, il y a en effet peu de chances pour que le client fasse demi-tour. Il est donc pratiquement obligé d’accepter qu’on enfreigne son droit de la personnalité.»
L’avertissement doit aussi être compris par tout le monde. En présence d’étrangers ne comprenant rien aux mots «contrôle de sac», on ne peut pas partir du principe qu’ils sont d’accord avec la fouille.
Notre partenaire alémanique K-Tip a publié en juin dernier ces informations. Suite à son article, les discounters Pick-Pay et Denner ont décidé d’adapter leurs pratiques qui n’étaient jusque-là pas totalement conformes aux dispositions légales (lire ci-dessous). Désormais, toutes les filiales de ces distributeurs ont pour instruction d’installer à l’entrée de leurs magasins des affiches en trois langues signalant une éventuelle fouille. Chez Pick-Pay, qui introduit progressivement ces nouvelles affiches depuis septembre dernier, les employés sont enjoints à faire des contrôles en cas de soupçon seulement. «Mais on ne peut obliger les clients», concède Christian Schmid, responsable du service de sécurité. De même chez Denner, il faut «un soupçon vraiment fondé», pour effectuer un contrôle, admet Alexander Galliker, secrétaire général.
Multilinguisme
Chez Waro, propriété de Denner, les contrôles ne se font qu’en cas de «soupçons raisonnés». Cependant, la chaîne continue à informer ses clients uniquement à la caisse qu’ils doivent tolérer un regard discret dans leur cabas. «Mais dans les grands centres Waro, souligne M. Galliker, ces affiches figurent également dans les parkings, en français, en allemand et en italien, ainsi que dans d’autres langues répandues en Suisse comme le serbo-croate et le turc». Des affiches qui demandent très poliment au client s’il est possible qu’il montre son sac à commissions à la caisse. Les lecteurs de Bon à savoir sauront désormais qu’ils ne sont pas obligés de répondre oui!
Contrôles
La main dans le sac
Les grandes surfaces Jumbo, Migros, Coop, Globus et Manor n’effectuent pas de contrôles de routine. Mais ils autorisent le personnel du magasin et de sécurité à procéder à une fouille lorsque quelqu’un est pris en flagrant délit de vol, tout simplement pour reprendre le butin du larcin.
S’il y a «seulement» un fort soupçon – par exemple parce qu’une alarme s’est déclenchée – la fouille reste l’affaire de la police. Le personnel peut cependant retenir le suspect jusqu’à l’arrivée des gardiens de l’ordre.