Depuis le 1er janvier 2013, le Code civil suisse offre aux patients le droit de déterminer eux-mêmes le traitement qu’ils recevront dans le cas où ils ne seraient plus capables de discernement. Le médecin ne peut ainsi plus maintenir artificiellement en vie un malade qui s’est explicitement prononcé contre tout acharnement thérapeutique.
«Attention à ne pas confondre cette démarche à une assistance au suicide», précise d’emblée Charles Dewarrat, directeur de la Croix-Rouge fribourgeoise. Le médecin ne peut en effet pas obtempérer si une personne lui demandait de mettre fin à ses jours. Pour être respectées, les «directives anticipées du patient» doivent en outre être élaborées dans les règles.
1 / Par où commencer?
Le document doit contenir le lieu, la date et la signature. Il n’est pas nécessaire de le faire authentifier par un notaire. Comme il est difficile de connaître les enjeux de la dernière phase de vie, plusieurs organismes proposent leurs services dans ce domaine. L’offre va du formulaire à compléter à un conseil personnalisé.
2 / A quel âge s’y mettre?
Selon le Code civil suisse, «toute personne capable de discernement», même un adolescent, peut faire cette démarche. Si la majorité de ceux qui le font sont dans la fleur de l’âge, les jeunes adultes devraient également y songer. En cas d’accident grave, ils peuvent aussi être inconscients. Les experts préconisent de ne pas attendre d’être malade.
3 / Quel modèle choisir?
Dans un domaine si sensible, on ne coche pas les cases comme si on jouait au loto. Certains formulaires posent des questions ouvertes sur les valeurs, la qualité de vie et les convictions religieuses du patient et requièrent une réflexion approfondie. Veut-on être réanimé à tout prix? Veut-on rester lucide, ou préfère-t-on, au contraire, éviter de souffrir, quel qu’en soit le prix? «Les mesures de prolongation de la vie incluent notamment la respiration artificielle et la réanimation cardiopulmonaire, mais aussi l’apport d’eau et de nutriments par voie artificielle», indique Valeska Beutel de Caritas. Certaines versions abordent enfin la question du don d’organes.
Les réponses permettront aux médecins d’adapter le traitement à la personnalité du patient. En cas de doute, ou si l’on ne comprend pas une question, mieux vaut ne pas y répondre. On désignera à cet effet deux personnes de confiance que le corps médical consultera, au besoin.
Plusieurs institutions (Ligue contre le cancer, FMH, La Main Tendue) mettent gratuitement en ligne des formulaires à télécharger pour les remplir.
4 / Où trouver de l’aide?
Les directives anticipées peuvent être remplies avec son médecin ou un conseiller spécialement formé. Plusieurs institutions assortissent le document d’un service d’assistance (tarifs variables selon les cantons chez Pro Senectute, entre 60 fr. et 130 fr. à la Croix-Rouge suisse).
5 / Où les conserver?
La première solution, c’est de demander à son médecin de mentionner l’existence des directives anticipées sur la puce électronique de sa carte d’assuré, et le lieu où elles sont conservées. En cas d’urgence, le corps médical a l’obligation de consulter les données stockées sur cette dernière. Tous les médecins ne sont toutefois pas équipés du matériel adéquat pour faire l’enregistrement. La seconde solution, c’est de porter sur soi une carte indiquant où trouver le document (à la maison, chez un proche ou le médecin de famille). De leur côté, Pro Senectute et la Croix-Rouge suisse proposent un dépôt électronique accessible 24heures/24. Ce service a toutefois un prix (29 fr. par an chez Pro Senectute) et 130 fr. à la Croix-Rouge suisse (montant unique). Les deux institutions proposent en outre régulièrement d’actualiser les directives.
6 / Les directives sont-elles contraignantes?
Oui, le corps médical doit s’y tenir. De même, les proches ne pourront pas demander des traitements allant à l’encontre des souhaits exprimés par le patient. A l’inverse, ce dernier ne peut pas prétendre à un traitement non reconnu ou prodigué dans un établissement donné. Il ne peut pas non plus exiger de rester à domicile à tout prix.
7 / Et si l’on ne tient pas à les rédiger?
Tout le monde n’est pas prêt à donner les instructions pour ses derniers jours. Il appartient alors aux proches de participer aux décisions. Soit, dans l’ordre: la personne de confiance mentionnée dans les directives anticipées, le conjoint ou le partenaire enregistré, la personne qui fait ménage commun avec le patient et lui prête régulièrement assistance, les enfants, les parents et les frères et sœurs.
Claire Houriet Rime