«Garantie Plus», «M-garantie + 3 ans», «Garantie longue durée»: les extensions de garantie trônent en bonne place dans les rayons de l’électroménager et de l’électronique. C’est ce que nous avons pu constater dans les sept enseignes que nous avons visitées incognito avec nos confrères de l’émission On en Parle (RSR, La Première) à Lausanne et à Genève (voir tableau).
Moyennant paiement, cette prestation permet, comme son nom l’indique, de prolonger d’un à trois ans, voire jusqu’à six ou dix ans chez Fust, la garantie de base qui, elle, est gratuite. De son côté, Media Markt annonce cinq ans. Le magasin brouille toutefois les pistes. La prolongation débute, en effet, à compter du premier jour de l’achat, et se superpose donc à la garantie de base accordée par le fabricant. Elle est par exemple de deux ans pour un lave-linge. Sa durée véritable n’est, par conséquent, que de trois ans.
Nos lave-linge, téléviseurs et autres laptops seraient-ils si peu fiables que l’extension de garantie soit la seule solution pour les préserver d’une panne quasi inévitable?
Business pour entreprises
Rien n’est moins sûr! Coop a d’ailleurs renoncé en 2007 à proposer cette offre à ses clients. «Dans la plupart des cas, elle ne profite qu’aux compagnies qui proposent ce service», indique la porte-parole du distributeur.
A défaut d’être vraiment indispensable pour le consommateur, ce type de contrat est surtout lucratif pour les enseignes qui le proposent. Les commerces s’octroient en effet une marge sur les contrats conclus. Mais, le responsable des services de la Fnac à Genève ne communique toutefois pas de chiffres précis. «Elles dépendent du produit sur lequel la prolongation est souscrite», concède-t-il tout de même. Comprenez: plus le prix du produit acheté est élevé, plus la marge réalisée par le commerce sera importante.
Sans compter que, dans certains magasins, sa conclusion influence directement la rémunération des vendeurs. C’est le cas chez Conforama, Fust, Interdiscount et dans certaines succursales de Media Markt.
Voilà qui éclaire sous un jour nouveau le zèle des vendeurs qui nous ont renseignés. Tous nous ont en effet proposé spontanément une extension de garantie, alors que nous n’avons que demandé des renseignements pour un lave-linge et une tablette numérique.
Exclusion en nombre
Certes, l’offre peut paraître tentante, surtout si l’appareil acheté est cher. De plus, le client doit souvent conclure le contrat au moment de l’achat. Il est donc psychologiquement prêt à dépenser plus pour se prémunir contre un éventuel pépin. Attention toutefois à ne pas y souscrire les yeux fermés.
Primo: les tarifs sont souvent onéreux, quand ils ne sont pas tout bonnement prohibitifs. Compter, par exemple, jusqu’à 240 fr. pour deux ans sur un iPad 32 Giga et jusqu’à 280 fr. pour une machine à laver d’une valeur de 799 fr. pour une durée identique. Soit respectivement 35% et 40% du prix de vente de l’appareil.
Secundo: les exclusions sont très nombreuses, l’intérêt de ce «service» est, par conséquent, tout relatif. Ce dernier n’inclut pas la prise en charge des accessoires ni des pièces dites d’usure (joint, broyeurs, soupapes etc., sur les machines à café, ou encore joint d’étanchéité pour les machines à laver, par exemple.)
Sont également exclus: les fausses manipulations, les mauvaises installations, une mauvaise aération, mais aussi les dégâts naturels et ceux causés par l’humidité, le sable... En cas de foudre, de tempête ou d’inondation, l’extension de garantie ne sera d’aucune aide. Media Markt et la Fnac font même preuve d’une extrême prudence et excluent encore les dommages consécutifs à une guerre!
De même, si l’appareil n’est pas réparable, les magasins indemnisent le client de deux manières: soit en lui fournissant un appareil de remplacement, dont les caractéristiques sont identiques au précédent, soit en lui remboursant le prix de l’appareil. Mais, inutile de rêver, le consommateur n’obtiendra quasiment jamais l’entier de la somme payée au départ! En effet, pour établir la valeur de remplacement, les enseignes tiennent compte du taux de vétusté de l’appareil. Il est en général de 1% par mois à compter du jour de l’achat de l’appareil. Au bout de deux ans, la valeur de remplacement de l’appareil est donc égale à 80% du prix d’achat neuf.
Pourtant, les vendeurs n’en informent pas spontanément le client. Nous l’avons nous-mêmes constaté lors de nos visites dans les différents commerces. Ce constat s’applique également aux conditions générales: seul Media Markt a accepté de nous les fournir pour information.
Au final, seuls les défauts de matériaux ou de fabrication sont couverts. C’est peu, d’autant que les produits d’aujourd’hui sont assez fiables. A moins d’être particulièrement malchanceux, il est donc peu probable que ce type de panne se produise. Et encore moins que tous vos appareils ménagers et électroniques en soient victimes. De surcroît, «si l’objet a un défaut, soit il se manifestera rapidement (pendant la garantie légale) ou alors en fin de vie de l’appareil», rappelle Christophe Inaebnit de l’atelier de réparation La Bonne Combine, à Renens (VD). Soit bien après la durée de prolongation de la garantie!
A chacun, dès lors, de décider d’assurer ou non la malchance.
Chantal Guyon
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