Fades, inconsistants, inodores à la cuisson: Marie-Claude Erskine, une de nos lectrices, n’a pas assez de termes pour qualifier les poulets qu’elle trouve dans le commerce. Pourtant, affirme Ruedi Zweifel, directeur d’Aviforum, centre de compétences de l’aviculture suisse, «les producteurs de volailles suisses ont fait de très gros efforts pour améliorer la qualité. Contrairement à certains pays voisins, la Suisse ne produit plus de poulets industriels depuis 1991. Et les stimulateurs de croissance sont interdits ainsi que les farines carnées et les farines de poisson.»
Pour comprendre les raisons du mécontentement de notre lectrice, Bon à Savoir s’est mis dans la peau du consommateur de base à la recherche d’un poulet suisse.
Premier problème: comme la production indigène ne couvre pas tous les besoins, il n’est pas rare de tomber sur des bêtes d’origine étrangère: 40% des poulets consommés sont en effet importés. Il faut donc ouvrir l’œil.
Déchiffrer l’étiquette
Deuxième encouble: devant les rayons réfrigérés des magasins, il n’est pas toujours facile de s’y retrouver. Certaines étiquettes sont en effet explicites, d’autres un peu moins. Chez Migros, par exemple, on lit simplement «Poulet M-Budget», «Poulet Mère Joséphine de la ferme» ou «Poulet bio». Si l’on devine que le dernier est biologique, il faut par contre enquêter auprès d’Optigal SA, fournisseur de Migros, pour savoir que le premier correspond à un poulet standard et le second à un poulet SST (lire plus bas).
Coop est plus transparent: pour chaque produit, une étiquette indique clairement s’il s’agit de «viande de stabulation respectueuse des animaux» (normes SST), de «poulets d’élevage avec parcours respectueux des animaux» (normes SRPA) ou encore de «poulets d’agriculture biologique contrôlée».
En Suisse, il existe en effet quatre méthodes d’élevage:
1. Les poulets SST
Base légale: ordonnance SST sur les systèmes de stabulation particulièrement respectueux des animaux.
> Durée de vie: entre 30 et 55 jours.
> Conditions de vie: élevage avec lumière du jour naturelle dans les poulaillers. Chaque poulet peut sortir dans une annexe couverte du bâtiment, une sorte de jardin d’hiver, quelques heures par jour.
> Nombre de poulets au m2: entre 12 et 15 volailles.
> Poids moyen dans l’étalage: entre 1 kg et 1,3 kg.
> Prix de vente: environ 10 fr. le kg.
> Part de marché: env. 80% de la production.
> Point de vue de Ruedi Zweifel: «Les poulets SST suisses constituent un très bon rapport qualité/
prix par leur mode d’élevage adapté aux besoins des animaux.»
2. Les poulets standards
Ces poulets sont élevés de la même façon que les poulets SST, sauf que:
> Ils ne sortent jamais.
> Ils coûtent un peu moins cher que les poulets SST, soit env. 9 fr. le kg.
> Leur part de marché représente env. 6% de la production.
3. Les poulets SRPA
> Base légale: ordonnance SRPA sur les sorties régulières en plein air d’animaux de rente.
> Durée de vie: au moins 56 jours. Dans cette catégorie, on trouve également les poulets fermiers. Ils vivent plus longtemps: entre 75 et 80 jours.
> Conditions de vie: dès le 22e jour, ces poulets passent le plus clair de leur temps à l’extérieur.
> Nombre de poulets au m2: max. 10 à 12 bêtes en fin d’élevage.
> Poids moyen dans l’étalage: 1,3 kg.
> Prix de vente: environ 13 fr. le kg de poulet SRPA et entre 15 fr. et
17 fr. le kg de poulet fermier.
> Part de marché: environ12% de la production.
> Point de vue de Jean-Pierre Lehnherr, directeur de Lehnherr SA, une entreprise qui commercialise le label «Poulet fermier de Gruyère»: «Après 70 jours pour un mâle et 80 jours pour une femelle, la bête a eu le temps de faire des muscles. Sa chair est compacte et goûteuse et sa forme allongée.»
4. Les poulets bio
> Bases légales: ordonnance sur l’agriculture biologique (annexe 5) et ordonnance SRPA.
> Durée de vie: suivant le label (Bourgeon suisse, Bio Engagement, Demeter, etc. lire en p. 9), entre
63 et 80 jours, parfois plus.
> Conditions de vie: comme les poulets SRPA, dès le 22e jour d’existence, ils sont la plupart du temps à l’extérieur. Leur nourriture se compose à 80% d’aliments issus de l’agriculture biologique.
> Nombre de poulets au m2: 8 à
10 bêtes.
> Poids moyen dans l’étalage: entre 1,2 kg et 1,5 kg.
> Prix de vente: entre 18 fr. et 25 fr. le kg.
> Part de marché: environ 2% de la production.
> Point de vue d’Edgar Bovier, chef cuisinier au Lausanne Palace & Spa: «Un poulet élevé en liberté donne une viande ferme, en particulier au niveau des cuisses, alors qu’un poulet de moins bonne qualité est plus tendre et friable à la cuisson.»
Marisa Dürst