«Don» pour l’ostéoporose
La Confédération finance une recherche par le biais de l’assurance ma- ladie. Sans bases légales, estime un expert en la matière.
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Bon à Savoir 02-1998
18.02.1998
Christian Chevrolet
Le groupe pharmaceutique Rochartis (nom fictif) découvre un nouveau médicament contre le cancer. Il doit cependant encore prouver son efficacité. Or, les recherches coûtent cher. Rochartis aimerait donc que les caisses maladie financent la suite de ses travaux, puisqu’elles économiseront peut-être un jour des millions de francs.
Scénario inimaginable? Pas vraiment. Dix hôpitaux suisses et quelques fabricants d’appareils pour des examens à base d’ultrasons en sont la preuve...
Le groupe pharmaceutique Rochartis (nom fictif) découvre un nouveau médicament contre le cancer. Il doit cependant encore prouver son efficacité. Or, les recherches coûtent cher. Rochartis aimerait donc que les caisses maladie financent la suite de ses travaux, puisqu’elles économiseront peut-être un jour des millions de francs.
Scénario inimaginable? Pas vraiment. Dix hôpitaux suisses et quelques fabricants d’appareils pour des examens à base d’ultrasons en sont la preuve. Afin de mener à bien une série d’études permettant de juger si ces appareils permettront de détecter à temps une ostéoporose, ils reçoivent en effet un «don» de trois millions de francs des caisses maladie.
En fait, les caisses maladie ont été forcées par l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) de couvrir la plus grande partie des frais de cette étude. «Avec très mauvaise grâce», admet Walter Frei, porte-parole du Concordat des assureurs maladie suisses.
L’OFAS s’est fondé sur l’art. 33 de la nouvelle loi sur l’assurance maladie (LAMal), où il est effectivement précisé qu’une prestation nouvelle peut être prise en charge si elle est en cours d’évaluation. Il n’y est en revanche nullement dit que l’évaluation elle-même peut être financée. D’où la grogne des assureurs.
Une voix officielle prend leur parti. «Un tel élargissement des prestations ne devrait pas être couvert par l’assurance de soins obligatoire», assure le professeur Alfred Maurer, expert en assurances maladie et auteur du commentaire de la LAMal. Aussi utiles que puissent être ces études, il n’existe pas de bases légales suffisantes pour autoriser un tel financement. Ce sont les fabricants des appareils, les hôpitaux concernés, voire le Fonds national pour la recherche qui devraient le faire, dans ces deux derniers cas via l’argent des impôts. «Sinon, conclut Alfred Maurer, l’assurance maladie ne sera plus qu’un tonneau sans fond.»
Autre avis, bien sûr, du côté du CHUV (Lausanne), où le professeur Peter Burckhardt, responsable des recherches, estime cette demande de financement tout à fait justifiée. En cas de réussite, les caisses vont en effet pouvoir économiser une partie des 1,3 milliard de francs dépensés annuellement pour l’ostéoporose.