Les élévateurs jaunes permettant aux passagers en fauteuil roulant de prendre le train seront bientôt exposés au Musée suisse des transports. En effet, selon la loi sur l’égalité pour les handicapés (LHand), entrée en vigueur en 2004, les transports publics doivent être accessibles à tous d’ici au 31 décembre 2023. Et il y a plus urgent: une première échéance, fixée au 31 janvier 2013, exigeait l’adaptation des automates à billets et des systèmes d’information à la clientèle (lire encadré).
Difficile, quand on a la chance de courir prendre son train, de mesurer le défi posé par la LHand. Il s’agit, d’une part, de réaménager les infrastructures des gares (rampes d’accès, quais surélevés, guichets et WC accessibles) et, d’autre part, de renouveler la flotte des véhicules ou de les équiper de marchepieds escamotables. La course contre la montre est engagée pour des centaines de gares, des milliers d’arrêts de bus et de véhicules.
Trains surbaissés
«Côté matériel roulant, je suis optimiste. Nous estimons que plus de 90% des bus, près de 70% des trams et 50% des trains seront accessibles aux personnes en fauteuil roulant en 2024», relève Werner Hofstetter, collaborateur romand du Bureau suisse «Personnes handicapées et transports publics.»
Les CFF indiquent, de leur côté, que le matériel roulant existant va être remplacé, par étapes, mais d’ici à 2035 seulement. «Depuis 2009, la quasi-totalité des trains régionaux de Suisse romande disposent d’accès plain-pied», mentionne Donatella Del Vecchio, porte-parole des CFF. C’est également le cas des trains Intercity à deux étages.
Werner Hofstetter est en revanche sceptique concernant l’infrastructure. «A quoi bon un train adapté si les quais ne sont pas accessibles?» Selon les CFF, si 350 gares ont déjà été aménagées, 410 devront l’être dans les dix ans à venir. De vrais travaux d’Hercule!
Consciente de l’enjeu, Berne a débloqué un fonds spécial de 600 millions de francs, octroyés à parts égales à la Confédération et aux cantons. Mais pas question de profiter de cette manne pour remplacer des wagons antédiluviens ou effectuer des travaux nécessaires avec ou sans LHand. Une partie des frais doit ainsi être prise sur le budget ordinaire des entreprises de transports.
Coûts flous
Selon l’état des lieux mis à jour par l’Office fédéral des transports publics, les deux tiers de la cagnotte ont déjà été adjugés, pour toutes entreprises de transports publics, aux travaux terminés ou en projet. Impossible, toutefois, d’obtenir les chiffres pour les dizaines de gares qui restent à assainir. «Ce n’est qu’à la fin de 2014 qu’une estimation des coûts sera réalisée», explique Donatella del Vecchio.
Une centaine de stations, situées sur une courbe de la voie, ne pourront, techniquement, pas être aménagées. Dans celles qui sont trop peu fréquentées, on cherchera d’autres solutions: un bus peut ainsi amener les passagers vers une gare aménagée. «Le bilan intermédiaire n’est pas flatteur», reconnaît Werner Hofstetter. La faute à «un manque de savoir-faire technique, à la pénurie de ressources, à la planification tardive».
Un gros effort reste enfin à faire du côté des communes, à qui il incombe d’adapter les arrêts de bus. Rares sont pourtant celles qui sont conscientes de leur responsabilité à cet égard.
Werner Hofstetter, qui se déplace lui-même en chaise roulante, salue pourtant les progrès réalisés depuis 2004. Il se rend désormais en transports publics aux séances concernant la LHand. La Suisse bouge lentement dans le bon sens.
Claire Houriet Rime
Des milliers d’automates à changer
Délai dépassé de quelques mois
La loi sur l’égalité pour les handicapés (LHand) donnait jusqu’au 31 décembre 2013 pour adapter les distributeurs de billets et l’information dans les transports publics aux clients malvoyants ou malentendants. Or, selon un sondage réalisé par l’association faîtière AGILE Entraide Suisse Handicap auprès de 112 entreprises de transport, seule la moitié des 77 qui ont répondu ont fait leurs devoirs!
Les CFF promettent de remplacer 1000 automates à billets d’ici à 2015 seulement, mais les passagers malvoyants peuvent déjà acheter un billet virtuel par téléphone, sans frais. Quant aux malentendants, certaines gares sont équipées d’amplificateurs inductifs pour les appareils auditifs. Un service par sms complète l’information dans les trains.