Les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) sont nocives pour la santé et ne se décomposent pas dans l’environnement. Elles s’accumulent dans les eaux, la terre, la nourriture et le corps humain. Près de la moitié des eaux souterraines en Suisse sont contaminées. Une analyse d’échantillons prélevés auprès de lecteurs de Bon à Savoir et de notre partenaire alémanique K-Tipp a révélé la présence de PFAS dans l’eau potable d’un ménage sur deux (lire «Polluants dans l’eau du robinet: un foyer sur deux concerné en Suisse»).
Les sources de cette pollution? L’Office fédéral de l’environnement (OFEV) évoque principalement l’industrie, qui utilise les PFAS pour enduire les poêles et les vêtements, ainsi que les pompiers, dont les produits extincteurs en contiennent également. Une étude menée par les organisations environnementales PAN Europe et Générations Futures montre cependant que les PFAS sont également rejetés en grandes quantités dans l’environnement par l’agriculture. Selon leur étude parue en novembre, 37 PFAS sont autorisés dans l’Union européenne en tant que pesticides. La plupart sont autorisés en Suisse. Selon les statistiques de l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG), les agriculteurs en ont pulvérisé 35 tonnes directement sur les champs en 2021. Il y a quinze ans, ce chiffre s’élevait à 22 tonnes.
Régions rurales davantage touchées
L’une des substances les plus utilisées est le désherbant Fufénacet. Ce poison se décompose dans les sols, notamment en trifluoroacétate, une forme de PFAS. L’organisation environnementale suisse Sans Poison a testé la présence de trifluoroacétate dans les eaux suisses en 2021. L’avocat et chimiste Hans Maurer révèle que les eaux souterraines des régions agricoles étaient beaucoup plus contaminées que celles à proximité de grandes agglomérations ou de zones industrielles.
Les chimistes cantonaux écrivent dans leur rapport sur les PFAS dans les nappes phréatiques que «l’influence de l’agriculture est possible» pour 75% des échantillons d’eau analysés. Leurs tests ont relevé presque autant de PFAS dans les eaux à proximité de zones agricoles que dans celles à proximité de zones industrielles.
Pourtant, les Offices fédéraux de l’environnement et de l’agriculture minimisent l’impact des pesticides dans la pollution aux PFAS. Les substances actives PFAS ne représenteraient que 1% à 1,5% de tous les pesticides utilisés. Les valeurs mesurées par la Confédération montrent, toutefois, que les échantillons d’eau provenant de localités agricoles comme Muri (AG), la Commune d'Aigle (VD) ou Niederhasli (ZH), font partie des huit qui dépassent les valeurs limites de l’Union européenne.
Jocelyn Daloz
Cet article a été modifié le 08.10.24
Il existe des alternatives
L’Union européenne étudie une interdiction des PFAS qui entrerait en vigueur en 2026 ou 2027. Les pesticides contenant des PFAS en sont toutefois explicitement exclus. L’écotoxicologue Henner Hollert, de l’Université Johann Wolfgang Goethe à Francfort-sur-le-Main (All.), s’en offusque: «Les PFAS doivent absolument être interdits dans l’agriculture également. Si les sols et les eaux sont pollués par des produits à base de PFAS, alors, tôt ou tard, les aliments qui sont produits ne seront plus consommables en toute sécurité.»
Hans Maurer ne comprend pas l’inaction des autorités: «Il existe des alternatives pour la plupart des PFAS. Y compris dans l’agriculture.»