Le principe de l’agriculture contractuelle de proximité a le vent en poupe: rien qu’en Suisse romande, quinze nouvelles structures ont vu le jour ces trois dernières années. La demande est tellement forte que plusieurs d’entre elles ont déjà des listes d’attente pour les nouveaux membres. S’il est original, le concept n’est pourtant pas nouveau: les premières coopératives agricoles ont été créées dans les années 70, en réaction à l’agriculture intensive jugée dangereuse et impersonnelle. En Suisse, les deux plus anciennes sont les Jardins de Cocagne, à Genève, et La Clef des Champs, dans le Jura. Aujourd’hui, il en existe près d’une vingtaine, répartie dans la plupart des cantons romands (voir tableau).
Liés par un contrat
Certaines structures sont organisées en coopératives, d’autres en associations ou encore en groupes de producteurs indépendants. Mais le principe demeure identique: les consommateurs et les producteurs sont liés par un contrat par lequel les premiers s’engagent à payer à l’avance un montant fixe et les seconds sont tenus de fournir une certaine quantité d’aliments.
La création d’une nouvelle structure dépend soit d’un groupe de consommateurs, à l’instar du Jardin Potager (Vaud), soit des producteurs eux-mêmes, comme Les Ares et vous (Genève). Selon les systèmes, la distribution est hebdomadaire, mensuelle ou annuelle. Le contenu peut également varier entre des fruits et légumes frais, des produits de garde ou des produits transformés (jus de fruits, miel, produits laitiers, vin, etc.).
Participation
Autre particularité: la participation à la production. Toutes les structures ne l’exigent pas, mais les coopératives peuvent demander à leurs membres de consacrer quelques demi-journées par année aux travaux agricoles ou à la préparation des paniers. Cette mesure a pour but de réduire le prix de la production, mais également d’instaurer une relation plus directe entre les consommateurs et les producteurs.
Le prix facturé aux clients varie d’une structure à l’autre, mais aussi selon le contenu et la taille du panier. A l’exception des systèmes où il n’y a qu’une ou deux livraisons par an, les paniers se paient selon un montant annuel fixe. Dans certaines coopératives, les membres doivent également acquérir une part sociale.
Prise de risques
Ce système induit nécessairement une certaine prise de risques, puisque le consommateur n’est pas certain d’obtenir la quantité de produits payés, la récolte dépendant des conditions extérieures comme le climat. Le producteur, quant à lui, prend un risque sur les prix. Ceux-ci étant fixés à l’avance, il ne peut pas les adapter en fonction de la récolte. «Les consommateurs qui adhèrent à ce système ne paient pas pour un produit, mais mandatent les agriculteurs pour cultiver une certaine surface et fournir les produits donnés», explique Nicolas Bezençon, secrétaire du syndicat agricole Uniterre. «Il existe donc un certain risque pour le consommateur, mais, jusqu’à présent, nous avons rarement constaté de grosses différences de récolte d’une année à l’autre.»Delphine Gachet
décodage
Valeurs défendues
Au-delà d’un système de production et de distribution, l’agriculture contractuelle de proximité repose sur un certain nombre de valeurs:
Proximité: favoriser une agriculture locale, des produits de saison et rétablir un contact direct entre producteurs et consommateurs.
Souveraineté: le droit pour le consommateur de savoir d’où viennent les aliments qu’il mange, qui les produit et dans quelles conditions.
Ecologie: La plupart des structures proposent des produits biologiques ou PER (prestations écologiques requises), une norme moins stricte, mais qui respecte un certain nombre de critères écologiques. Le système permet de limiter l’impact lié au transport des marchandises.