Rémy Laurent connaît la taxe pharmacien et la taxe patient. Mais jamais il n’avait entendu dire que la substitution d’un médicament original par son générique faisait l’objet d’un supplément. Et pourtant, son pharmacien lui a facturé 2,35 fr. pour avoir remplacé le Ponstan prescrit par son médecin, (9,40 fr.), par du Mephadolor, un générique vendu 3,50 fr.
Rien d’illégal à ça: une convention additionnelle à la rémunération des prestations pharmaceutiques (REP) prévoit, en effet, que le pharmacien touche 40% de l’économie réalisée grâce au générique, mais 21,60 fr. au plus (plafond).
Du coup, dans certains cas, la substitution par un générique meilleur marché rapporte plus au pharmacien que s’il vendait le médicament original. Les frais encaissés lors de la substitution du Reniten par l’Enatec, par exemple, compensent largement la perte de sa marge (voir graphique). Rémy Laurent n’en revient pas: «C’est aberrant! En principe, on choisit un générique pour faire baisser les coûts de la santé, pas pour que
le pharmacien encaisse un supplément au passage».
Heures supp’
Pour le secrétaire général de la Société suisse de pharmacie (SSPH) Marcel Mesnil, on ne peut pas parler de supplément: «Les substitutions par des génériques engendrent un important surplus de travail qui doit bien être rémunéré.»
Quel travail? Lorsque le pharmacien propose un générique, il doit, notamment, convaincre le client de l’accepter, sélectionner le produit le mieux approprié, puis inscrire la substitution dans le dossier du client et sur la facture destinée à l’assurance. Enfin et surtout, il doit en informer le médecin: «Ce qui revient parfois à devoir se justifier, voire, à se faire disputer», précise Marcel Mesnil.
Mais ces frais ne concernent que les médicaments sur prescription médicale obligatoire et ne sont facturés que lors de la première remise du médicament. Le renouvellement de l’ordonnance ne fait pas l’objet de frais de substitution et les assureurs, tout comme les patients, retrouvent la totalité de l’économie, dès la deuxième prescription.
Il n’empêche que notre lecteur, en acceptant un générique, rémunère deux fois le travail de son pharmacien, puisqu’il a aussi payé la taxe pharmacien (4,30 fr. par médicament) et la taxe dossier (7,55 fr. par trimestre). «Si le médecin avait inscrit sur l’ordonnance la substance active du médicament ou le générique, le pharmacien n’aurait pas eu tout ce travail supplémentaire», rétorque Marcel Mesnil.
Pour faire des économies de santé, deux encouragements pécuniaires valent donc mieux qu’un seul... Autre solution: demander directement à son médecin de prescrire un générique.
Joy Demeulemeester