«Je voulais acheter deux bons d’une valeur de 500 fr. pour MediaMarkt, dont la mise débutait à 380 fr. sur ricardo.ch», explique Pierre*. Si l’utilisateur a remporté l’enchère, il n’a jamais vu la couleur des rabais. Et pour cause: ceux-ci n’existent pas. Un internaute malintentionné a mis en vente de faux bons pour empocher de l’argent facilement.
Pierre se rend fréquemment sur la plateforme en ligne et en connaît bien les risques. Il avait donc vérifié les évaluations données par d’autres internautes sur le vendeur en question avant d’acheter. «Celles-ci étaient positives; il a dû vendre correctement des articles au début, pour qu’on lui fasse confiance», estime-t-il.
Trois faux bons à 1200 fr.
Après une recherche sur internet, notre lecteur se rend compte qu’il n’est de loin pas le seul à s’être fait berner. Plusieurs ventes de bons fictifs ont permis au fraudeur d’encaisser des dizaines de milliers de francs. Sur la page de l’utilisateur figure une liste impressionnante de rabais pour différents commerces ou services. Les transactions ont eu lieu du 6 janvier au 10 février de cette année.
Hugo*, un autre acheteur, s’est aussi fait avoir, mais avec une autre offre: trois bons CFF pour un montant d’environ 1200 fr. Ce qui agace le plus nos deux victimes, c’est le manque de réactivité dans la sécurité de ricardo.ch. Car, quand ils se sont plaints, comme d’autres, aux responsables du site, ils leur ont répondu qu’il n’était pas possible d’agir avant qu’eux-mêmes soient informés par des clients. «Visiblement, les premiers lésés ont tardé à avertir le site, réagit Pierre. Mais il est tout de même invraisemblable de pouvoir vendre tous ces produits sans que cela alerte la sécurité de la plateforme!»
L’entreprise admet un couac
Ricardo dit avoir reçu les deux premières évaluations négatives le 13 février et bloqué le compte le lendemain. «Ce vendeur a échappé à nos contrôles de sécurité pour des raisons que nous ne pouvons pas communiquer, afin de ne pas les révéler à des gens malhonnêtes», réagit toutefois la société.
L’autre point qui énerve nos lecteurs est la «protection pour acheteur» mise à disposition par le site. Avec cette dernière, les acheteurs sont automatiquement protégés contre les arnaques. Mais le montant remboursé est limité à 250 fr., auquel il faut enlever une franchise de 10% (minimum 10 fr., maximum 25 fr.). De plus, lorsqu’il s’agit d’un achat multiple, la somme restante doit être partagée entre les différents acquéreurs. Dans le cas de Pierre, deux autres internautes ont également acquis des bons. Il ne reste donc plus qu’une soixantaine de francs de dédommagement, une somme dérisoire par rapport aux 760 fr. perdus.
«Cette protection est un service que nous offrons volontairement; nous souhaitons que les victimes d’une escroquerie puis sent recevoir une compensation, mais nous ne sommes pas obligés de proposer un tel service», rétorque la plateforme de commerce en ligne. Qui ajoute qu’elle n’est qu’un intermédiaire, et ne fait donc pas partie du contrat.
Eviter des achats de plus de 250 fr.
Il n’empêche que le site touche de l’argent via des frais prélevés sur chaque vente. «Au-delà de toutes les mesures de restriction que nous pourrions prendre, nous en appelons surtout à la responsabilité de chacun de faire attention à ses transactions, et plus particulièrement lorsqu’il s’agit d’un objet d’une grande valeur», déclare ricardo.ch. Pour notre part, nous ne pouvons que conseiller aux utilisateurs d’éviter d’acheter des biens pour une somme dépassant 250 fr. Au-dessus, ils ne sont tous simplement plus protégés.
Pierre a porté plainte contre le vendeur. Ce dernier a pu être interpelé en Suisse alémanique où se trouve la plupart des victimes. Conseillé par la police, il a joint sa plainte à une douzaine d’autres dans le canton de Zurich. Mais rien ne dit qu’il reverra un jour la couleur de son argent.
Loïc Delacour
*Prénoms d’emprunt.