«Si un extraterrestre débarquait sur Terre pour étudier les bactéries, il conclurait probablement qu’il doit se laver les mains dans la cuvette des W.-C. et faire ses besoins dans l’évier!» Charles P. Gerba aime les formules chocs. Non content d’avoir réglé leur compte aux éviers, ce microbiologiste renommé, de l’Université d’Arizona (USA), s’est aussi amusé à «réhabiliter» les toilettes en s’attaquant aux téléphones, claviers et autres souris. Sur la base de 7000 échantillons prélevés en entreprises, son étude – financée par une marque de lingettes désinfectantes – affirme que les éléments usuels des bureaux contiennent jusqu’à 500 fois plus de bactéries que les cuvettes des W.-C. des lieux étudiés.
Vraiment? «C’est tout à fait possible, un clavier peut très bien ne pas avoir été nettoyé depuis six mois alors que les toilettes l’ont été plus régulièrement», répond Jacques Bille, directeur de l’Institut de microbiologie du CHUV, constatant au passage que la touche «enter» de son clavier n’est pas exempte de tout reproche. De là à en déduire qu’on joue sa vie en cliquant sur sa souris, il y a un pas que ne franchit pas le docteur Bille: «Un clavier n’est tout simplement pas stérile, tout comme les doigts d’ailleurs. Dans l’immense majorité des situations, cela ne représente donc aucun danger.»
Le yogourt, ce nid à bactéries
Les bactéries figurent en fait parmi les organismes les plus abondants sur Terre. On en trouve partout, sur tous les objets, sur notre peau, dans notre bouche, ainsi que dans l’estomac et l’intestin où, infatigables travailleuses, elles transforment le bol alimentaire en carburant pour notre organisme. Beaucoup de bactéries sont ainsi nos amies, travaillant aussi bien dans notre corps qu’ailleurs. Eh oui, elles s’avèrent, par exemple, indispensables à la fabrication des yogourts et du vin.
Mais il y en a aussi des «méchantes», dites pathogènes, responsables de graves infections. Bien qu’elles constituent un réel problème en milieu hospitalier, elles ne sont pas pour autant omnipotentes. «Il faut qu’elles puissent déjouer les barrières naturelles en pénétrant, par exemple, dans le corps par une blessure. Elles doivent se trouver en quantités suffisantes pour vaincre les défenses humaines et parvenir à s’attacher à des cellules. Bref, il faut toutes sortes de conditions en faveur des bactéries et en défaveur de la victime pour qu’elles puissent l’infecter. Les enfants et les personnes âgées sont plus vulnérables», résume Jacques Bille.
Pas besoin de masque
Inutile donc d’acheter les gants et le masque chirurgical chers à Michael Jackson. Le professeur Bille conseille simplement de «respecter quelques règles d’hygiène et de bon sens». Bien désinfecter les plaies et se laver les mains après être allé aux toilettes font partie des précautions élémentaires. Dans certains pays, on prendra soin de ne boire que l’eau mise en bouteille ou bouillie (lire l’encadré).
Quant à nos lieux de travail, outre le fait qu’un bureau sale est rebutant, l’Américain Charles P. Gerba insiste sur l’importance d’une bonne hygiène: «Des études ont montré que les surfaces jouent un rôle dans la transmission des germes provoquant la grippe ou des troubles intestinaux. Les garder propres est la meilleure option pour s’en prémunir. Bien sûr, si vous êtes seul à utiliser votre téléphone, vous ne devez pas vous inquiéter. Les germes responsables des maladies ne se transmettent de personne à personne par ce type de surfaces que si elles sont partagées.»
Sébastien Sautebin
prévention
A la cuisine
Les bactéries sont la cause la plus commune d’intoxication alimentaire. Il est donc conseillé de:
> garder les aliments au frais afin d’empêcher la croissance de la plupart des bactéries dangereuses;
> conserver et préparer viande, volaille et poisson séparément;
> laver son couteau si l’on coupe de la viande puis de la salade;
> se laver souvent les mains, ainsi que les surfaces de travail;
> cuire la viande, la volaille et les œufs à des températures suffisamment élevées (variables selon le type de viande, mais au minimum 70°C à cœur) afin d’éliminer les germes pathogènes.