Survenue le 24 avril dernier, la catastrophe de l’usine Rana Plaza au Bangladesh a fait plus d’un millier de morts, le double de blessés. Ce sont principalement des ouvriers de l’industrie du textile qui y travaillaient. Ces derniers avaient pourtant informé leur direction du mauvais état du bâtiment. En vain.
Plusieurs grandes marques, comme Benetton ou Mango, ont confirmé qu’une partie de leurs vêtements étaient produits dans cette usine. D’autres ne l’ont pas fait, alors que des étiquettes à leur nom jonchaient les débris. Certaines promettent pourtant aux consommateurs de respecter des chartes éthiques, de se soucier des conditions de travail dans la sous-traitance, armés parfois de labels censés confirmer ces bonnes volontés.
Un guide d’achat édité en Suisse
La Déclaration de Berne (DB), active dans le domaine du développement durable, sensibilise depuis longtemps la population sur les dérives de l’industrie textile. Elle coordonne, en Suisse, la Campagne Clean Clothes (CCC) ayant pour but l’amélioration des conditions de travail dans toute la chaîne de production.
Dans ce cadre, la DB édite un petit guide d’achat disponible dans certains magasins, sur son site internet www.evb.ch/fr ou via une application pour iPhone. On y trouve une évaluation de chaque marque selon des critères de transparence, de code de conduite, de mise en œuvre, mais aussi de vérification des conditions dans lesquelles nos habits sont produits.
Les marques suisses Switcher, Remei (ligne Naturaline de Coop), Mammut et Odlo sont par exemple qualifiées de «pionnières», H&M fait partie des «prudentes», alors que New Yorker, Pimkie ou encore Chicorée sont, elles, jugées «opaques».
Enquête en cours
Il ne s’agit pas d’un label, précise la DB, mais bien du résultat d’une enquête basée sur un questionnaire et des recherches complémentaires. Qui s’est déroulée en 2010 avec une actualisation en 2012 pour les entreprises spécialisées dans les vêtements outdoor. Une nouvelle enquête sera publiée au printemps 2014.
Si les consommateurs peuvent utiliser cet outil pour guider leurs achats d’habits, peuvent-ils également faire confiance aux labels? La DB les a aussi analysés. «Souvent, ils ne concernent que la production des matières premières, donc du coton, mais pas les conditions de travail dans toute la chaîne de fabrication du vêtement», explique Géraldine Viret, sa porte-parole.
Un label actif dans quatre pays producteurs
La principale référence se nomme Fair Wear Fondation (FWF). L’organisation œuvre directement avec les fabricants, afin d’améliorer les conditions des travailleurs. Elle se focalise principalement sur quatre pays qui sont parmi les plus gros producteurs de textile: le Bangladesh, la Chine, l’Inde et la Turquie, et y effectue des contrôles.
Huit compagnies suisses y sont affiliées. On retrouve les trois entreprises «pionnières» citées plus haut, mais aussi Albiro, Blackout ou encore Mountain Force.
Gare à l’argument marketing!
Certaines entreprises ont lancé leur propre label. Pour la DB, il s’agit plus souvent d’un argument marketing. «Quand H&M a lancé sa collection «Conscious Collection» avec Vanessa Paradis, nous avons réagi directement, raconte Géraldine Viret. Car, si le coton est bien bio, le reste de la chaîne de production n’est pas éthique pour autant.» L’association accuse d’ailleurs la marque suédoise de fermer les yeux sur les conditions déplorables des couturières cambodgiennes.
Enfin, d’autres acteurs promeuvent l’achat responsable de vêtements. C’est le cas notamment de l’association romande NiceFuture à travers sa boutique en ligne www.boutiketik.ch et son guide du shopping éthique. On y trouve une sélection de marques ou de revendeurs pas forcément labélisés, mais qui, dans leur communication, affirment respecter le producteur en lui payant son travail équitablement.
Que ce soit des évaluations indépendantes, des labels ou des sélections de spécialistes, plusieurs outils sont donc à disposition des consommateurs pour choisir des vêtements fabriqués dans les meilleures conditions. Et au final, même si le doute peut toujours subsister, choisir une marque a priori éthique ne peut faire qu’améliorer la situation des travailleurs du textile. Au Bangladesh comme ailleurs.
Loïc Delacour