Les primes qu’il faudra payer l’an prochain pour l’assurance maladie obligatoire sont à nouveau à la hausse sur le plan national, mais plutôt stables en Suisse romande. Bonne nouvelle donc pour le porte-monnaie, mais dommage pour les bonnes résolutions. Car si vous aviez décidé de changer de caisse pour d’autres raisons que le montant des primes, vous voici peut-être obligé d’attendre l’année prochaine. La loi prévoit en effet que s’il n’y a pas d’augmentation de prime, on ne peut passer à la concurrence qu’à la fin d’une année civile, mais avec un délai de résiliation de trois mois. Or, les primes sont rendues publiques en octobre, donc trop tard…
Dommage, car comme le montre le travail rapporté dans les pages qui suivent, le montant des primes est une chose primordiale, mais la qualité du travail effectué par les assureurs en est
une autre, tout aussi importante. Jean-Claude Eggimann, consultant en droit et en assurances en sait quelque chose. Il est membre du groupe de travail «Critères de qualité des assureurs maladie», issu du feu Conseil genevois de la Santé, composé de personnalités issues du monde des assurances et de la finance. Et c’est avec ce groupe qu’il a entrepris un travail de bénédictin, définissant les critères d’une évaluation détaillée des assureurs, ainsi que leur pondération. Il a cependant effectué seul le travail de dépouillement et la cotation.
Cette évaluation, la plus précise qu’il nous ait été donné de voir à ce jour, ne concerne malheureusement que huit caisses, mais qui assurent 5 millions de personnes en Suisse. Les autres n’ont pas répondu. Toutefois, comme certaines informations peuvent être obtenues via l’OFAS, il a été possible de les appliquer à dix-sept caisses et d’établir une évaluation restreinte (voir p. 27).
La cotation s’est faite de 0 à 6 (moyenne: 4). Elle a ensuite été pondérée en fonction de l’importance de chaque critère. Les caisses maladie devaient répondre à un questionnaire détaillé, et surtout étayer leurs réponses à l’aide de divers documents.
1. Distinction entre assurance obligatoire et assurances complémentaires
On ne le répétera jamais assez: l’assurance obligatoire dépend de la LAMal (loi sur l’assurance maladie), mais les assurances complémentaires de la LCA (loi sur les contrats d’assurance). Dans le premier cas, la Confédération dicte strictement la façon de faire et oblige les caisses à assurer n’importe quel habitant des cantons où elles proposent leurs services, sans réserve ni différences dues à l’âge, au sexe ou à l’état de santé. Il en va tout autrement des assurances complémentaires, où la marge de manœuvre des caisses est énorme. La plupart d’entre elles, par exemple, refusent les adhésions dès 60 ans.
L’assureur de qualité doit donc faciliter à son assuré, dans tous les documents (attestation ou police d’assurance, avis ou facture de prime, décompte de prestations, etc.), tout comme dans la correspondance, la distinction entre assurance obligatoire des soins et assurances complémentaires.
L’analyse a porté sur la rédaction du contrat d’assurance (attestation, police, règlements et conditions d’assurance) et sur l’existence d’un tableau synoptique des prestations assurées.
2. Politique d’information
L’article 16 de la LAMal stipule que «les assureurs sont tenus de renseigner les personnes intéressées sur leurs droits et obligations et de les conseiller». Ils doivent le faire sur demande, mais aussi spontanément.
L’analyse a donc porté sur la politique d’information aux assurés en général. Est-elle spontanée? – publications (régulières ou non) ou lettres accompagnant le décompte des prestations, avis de prime, rappels de paiement, etc. Ou se fait-elle sur requête? – organisation des réponses téléphoniques ou par écrit.
3. Terminologie compréhensible
L’assureur de qualité utilise, dans tous les documents (attestation ou police d’assurance, avis ou facture de primes, décompte de prestations)
et dans la correspondance, des termes compréhensibles pour l’assuré. Il évite donc, dans la mesure du possible, le jargon des assureurs et des juristes. «C’est un exercice redoutable, concède Jean-Claude Eggimann, lui-même juriste de formation. Car il faut tout à la fois des propos clairs et inattaquables. Mais c’est tout à fait possible!»
4. Système de contrôle des factures
Les articles 42 et 56 de la LAMal obligent les caisses maladie à transmettre à l’assuré «toutes les indications nécessaires pour qu’il puisse vérifier le caractère économique des prestations», mais également «à limiter ses prestations à la mesure exigée par l’intérêt de l’assuré et le but du traitement».
Une caisse maladie est donc obligée d’effectuer de tels contrôles. «Les assurés ont tendance à considérer cet exercice comme une limite des prestations, explique Jean-Claude Eggimann. Ce n’est pas faux, mais indispensable à la saine gestion
d’une assurance minimale. Et cela se ressentira forcément dans le montant des primes. Il faut donc voir un tout petit peu plus loin que ses intérêts individuels et immédiats.»
L’analyse a ainsi porté sur la politique de contrôle des assureurs, par sondages ou systématique, et sur l’existence de mesures de responsabilisation.
5. Sinistres (rapidité
de liquidation, clarté des décomptes)
L’assureur de qualité liquide rapidement les cas d’assurance apparemment sans problèmes, pour concentrer ses forces sur le contrôle des cas qui, d’expérience, méritent un approfondissement. Il met en outre un point d’honneur à renseigner clairement ses assurés sur les prestations payées, sur leur participation, etc.. «Je regrette, souligne Jean-Claude Eggimann, qu’aucun assureur n’indique le solde résiduel de la franchise: vous avez déjà réglé tant, il vous reste donc à payer tant avant qu’on ne vous rembourse les prestations».
6. Clarté des décisions LAMal
La loi oblige les caisses à prendre ce qu’on appelle des «décisions de principe» (au sens de l’art. 85), lorsque l’assuré s’oppose à une décision antérieure. Elles doivent être motivées et indiquer les voies de recours. On peut aussi s’attendre à ce qu’elles soient rendues dans un délai raisonnable et de manière compréhensible par le commun des mortels. L’analyse a porté sur des exemples concrets de décisions.
7. Protection de la sphère privée
La protection de la sphère privée commence par la séparation absolue entre assurance obligatoire des soins et assurances complémentaires. De nombreux assureurs ont en effet pris la mauvaise habitude de présenter leurs formulaires d’adhésion de telle façon que l’assuré remplisse systématiquement un questionnaire détaillé concernant son état de santé, alors qu’il n’est pas tenu de le faire pour l’assurance obligatoire.
Mais elle dépend aussi de la politique de la caisse en matière de protection des données. «Dans certaines compagnies, illustre Jean-Claude Eggimann, le dossier du patient ne quitte pas le bureau du médecin-conseil sans son autorisation».
8. Formation des collaboratrices et collaborateurs
L’assureur de qualité accorde une importance prioritaire au niveau de compétences professionnelles de ses collaborateurs. Il porte notamment son attention sur les qualités spécifiques de celles et ceux appelés à traiter avec la clientèle. L’analyse a donc porté sur la politique de formation initiale et continue des assureurs.
9. Niveau de la comptabilité
L’OFAS impose un système comptable officiel. «Mais il est insuffisant pour mener une caisse au succès, estime Jean-Claude Eggimann. Un assureur de qualité doit développer une comptabilité analytique lui permettant de calculer le rendement technique de chaque prestation importante, de justifier ses prétentions tarifaires dans les négociations avec chaque fournisseur de prestations, d’évaluer l’influence sur les primes de nouvelles couvertures d’assurance, etc.»
10. Pertinence des statistiques
Une caisse maladie se doit d’élaborer et d’exécuter un programme de statistiques lui permettant un calcul fiable des primes, un contrôle permanent du résultat technique de son activité, des négociations documentées avec les fournisseurs de prestations, etc.
11. Décompte des prestations
Avec le système des franchises et de la participation, il est important que le paiement des prestations soit clairement expliqué: distinction entre assurance obligatoire et éventuelles assurances complémentaires, entre ce qui doit être payé par l’assuré et ce qui est à la charge de la caisse, etc.
12. Niveau des primes sur trois ans
L’assureur de qualité s’efforce, par une politique avisée de calcul des primes, d’éviter les fluctuations trop marquées d’une année à l’autre. L’analyse a donc porté sur l’évolution (depuis 1996, date d’entrée en vigueur de la LAMal) du niveau moyen des primes de l’assurance obligatoire des soins dans les cantons de Suisse romande.
13. Réserves
La loi oblige les assureurs à créer et conserver des réserves, afin de garantir la situation financière au cas où les coûts seraient plus élevés que prévu. Mais l’accumulation inutile de capitaux n’est pas non plus souhaitable. L’OFAS pousse d’ailleurs les caisses à utiliser les réserves trop importantes pour éviter les augmentations des primes. L’analyse a porté sur l’évolution du taux des réserves pendant deux ans.
14. Rendement technique
Il s’agit du rapport entre
le montant des primes encaissées et celui utilisé pour les règlements des sinistres, tous frais confondus. La prévision idéale est d’arriver à 100% (le montant des primes a été parfaitement calculé). «C’est une fois encore un exercice délicat, commente Jean-Claude Eggimann, car l’assureur doit aussi constituer des provisions suffisantes pour les cas d’assurance non liquidés, même si l’opération oblige à augmenter le niveau des primes». Les difficultés de Visana, avouées l’an dernier, expliquent la note calamiteuse qu’elle a reçue.
15. Frais généraux
On estime qu’une caisse peut consacrer entre 6 et 7% de son budget aux moyens nécessaires à une gestion efficace (informatique performante, collaborateurs compétents, milieu de travail motivant, etc.). L’analyse a donc porté sur la proportion comparée des frais généraux durant deux ans.
Christian Chevrolet
stabiliser ses dépenses
La traque aux dépenses inutiles
Stabiliser les dépenses concédées à l’assurance maladie. Tel est le but qu’espère faire atteindre le GPFI (Groupement pour la participation de la famille aux informations sociales) à tous ses membres et à ceux qui souhaitent le devenir. Grands spécialistes de l’assurance, ses responsables lancent en effet une vaste opération visant à limiter les dépenses dans ce domaine.
Le principe est simple, mais efficace: la personne intéressée à limiter ses frais fait parvenir une copie de ses polices d’assurance de base et complémentaires au GPFI (*). L’un de ses sept conseillers entrera alors en contact téléphonique et fera, avec l’assuré, un bilan du dossier, traquant impitoyablement les doublons, l’inutile (ou le peu utile) et passant en revue tous les moyens d’économiser ici et là quelques francs. Avec l’espoir que l’addition de ces petites économies permette de combler les éventuelles hausses à venir. Le GPFI achèvera l’opération en faisant parvenir à l’assuré un plan des démarches à faire (des deux côtés), ainsi que les modèles de lettre nécessaires.
Une démarche intelligente et responsable, gratuite pour les membres ou
ceux qui veulent le devenir (30 fr./semestre), mais facturée 74 fr. aux autres.
(*) GPFI, rue de l’Hôpital 11, 2000 Neuchâtel. ((032) 724 14 15. Fax: 032) 721 48 81
toutes les primes de l’an 2000
Tapez www.bonasavoir.ch
Bon à Savoir, en collaboration avec Edicom, propose sur Internet une comparaison des tarifs 2000 de 22 caisses maladie en Suisse romande (Berne inclus). Il suffit d’entrer son numéro postal, le nom de sa caisse maladie, sa catégorie (enfant, étudiant, adulte) et
sa franchise pour savoir si ses primes augmentent et les comparer avec les 21 autres compagnies, rapidement, d’un seul coup d’œil.
Nos abonnés qui ne sont pas connectés à Internet peuvent obtenir gratuitement un tableau des primes pratiquées dans leur canton. Attention: elles ne seront envoyées qu’aux personnes mentionnant leur numéro d’abonné (à gauche au-dessus de l’adresse en page 32 du journal) dans leur demande et joindront une enveloppe affranchie avec leur adresse à Bon à Savoir, CP 150, 1001 Lausanne.
Evaluation restreinte de 17 caisses maladie (critères financiers)
12 Niveau de primes sur trois ans (4/6) 5 5 5 4 4 4 5 5 4 4 4 4 5 5 2 2 3 2
13 Réserves (3.5/6) 5 4 4 5 5 5 4 4 5 5 5 4 3 2 2 5 4 4
14 Rendement technique (3.5/6) 6 6 5 6 6 6 5 6 5 5 4 4 6 6 6 2 1 2
15 Frais généraux (3.5/6) 6 5 6 5 5 5 5 4 5 4 4 5 2 2 5 5 5 4
Total sans pondération 22 20 20 20 20 20 19 19 19 18 17 17 16 15 15 14 13 12
TOTAL PONDERE max. 14,5 13,3 12,1 12,1 12 12 12 11,5 11,5 11.,4 10,8 10,3 10,3 9,8 9,2 8,9 8,3 7,3 7,2