Le scénario a servi pour plus d’un épisode d’Urgences et d’autres séries médicales: une ambulance surgit, sirène hurlante, transportant un patient inconscient. Il est aussitôt pris en charge par le personnel soignant. Arrive alors un proche, bouleversé, qui indique que le patient ne souhaite pas de réanimation. Il est suivi par un parent, averti par l’hôpital, qui affirme tout le contraire. Commence alors une pénible discussion autour du malade.
Pour éviter ces débats et doutes autour des souhaits d’un proche, chacun peut rédiger ses «directives anticipées». Un document reconnu par les lois sanitaires romandes, mais encore méconnu. «Les médecins doivent s’y conformer, explique Anne-Marie Bollier, déléguée romande de l’OSP(1) (Organisation suisse des patients). Et on peut nommer une ou plusieurs personnes de confiance – des représentants thérapeutiques* – qui veilleront au respect des directives et prendront les décisions à la place du malade.»
Si un médecin estime ne pas pouvoir suivre les vœux du patient ou de son représentant, une autorité ad hoc, par exemple le comité d’éthique d’un hôpital, tranchera rapidement.
Lois cantonales
En l’absence de directives, ou d’un représentant thérapeutique, les dispositions varient selon le canton.
- BE, FR, VD: le médecin doit prendre l’avis des proches, sans cependant y être lié.
- GE: en l’absence du représentant légal, le médecin demandera aux proches quelle est la volonté présumée du patient, et décidera en leur absence.
- JU, NE: aux proches de décider à défaut, au médecin.
- VS: le soignant n’est pas tenu de consulter les proches.
Un bilan de vie
Réfléchir à ses directives implique de tirer un bilan et de s’interroger sur ses convictions, ses priorités en matière de qualité et de projet de vie. On se demandera, entre autres:
- Est-ce que je souhaite être ranimé(e) à tout prix?
- Voudrais-je être maintenu(e) en vie même si mon cerveau est irrémédiablement endommagé?
- Est-ce que je désire qu’on continue tout traitement qui peut prolonger ma vie, même s’il ne peut me guérir?
- Y a-t-il des soins/médicaments que je refuse?
- Quelles sont mes craintes et attentes concernant le traitement de la douleur?
- Est-ce que je souhaite donner mes organes?
Anne-Marie Bollier conseille de rédiger ses directives dès l’âge de 18 ans: «Car chacun peut avoir un accident ou une maladie le rendant soudain incapable de discernement.» Par ailleurs, on devrait y penser surtout: - Si l’on souffre d’une maladie pouvant entraîner un décès subit (p.ex. problème cardiaque).
- Avant une intervention chirurgicale, surtout si elle est très risquée.
- En cas de maladie psychique pouvant entraîner une incapacité de discernement passagère ou durable.
- Lors de l’entrée en EMS (établissement médico-social).
Forme écrite
Pour rédiger les directives, Anne-Marie Bollier recommande de demander conseil à un professionnel (médecin, soignant, assistant social, etc.), familiarisé avec le milieu hospitalier. Le document, révocable à tout moment, doit être écrit (à la main, à la machine ou à l’ordinateur), signé et daté.
Il peut commencer ainsi: «Le jour où je ne serai plus en état de prendre une décision moi-même, je soussigné(e), né(e) le jj.mm.aaaa, demande, après mûre réflexion et en pleine possession de mes facultés, que soient respectées les disposition suivantes: ...»
Pour réduire les interprétations, le texte doit être clair et explicite (éviter des termes généraux tels que «acharnement thérapeutique»). D’ailleurs, divers organismes(2), dont l’OSP et la Fondation suisse de cardiologie fournissent des formulaires tout prêts à remplir, avec une carte, à porter sur soi, pour signaler l’existence des directives et les coordonnées du représentant.
Enfin, il faut penser à avertir ses proches et son médecin traitant de l’existence des directives, et les revoir régulièrement (p.ex. tous les deux ans). Sans quoi, si elles datent trop, leur validité peut être mise en doute.
Ellen Weigand
(1) www.spo.ch
(2) Bonus Web: Infos et liens sur les adresses
Bonus Web: Bien choisir son représentant thérapeutique