Depuis cette année, l’assurance de base doit rembourser tous les deux ans une mammographie de dépistage aux femmes dès l’âge de 50 ans. En théorie. Car, avant de démarrer ces programmes, le Conseil fédéral a exigé l’établissement d’une convention nationale de garantie de qualité des radiographies (lecture des clichés par deux médecins, puis par un troisième en cas de non-concordance des avis, appareils de qualité, centres agréés, etc.). Aux fournisseurs de prestations (médecins, radiologues) et aux caisses maladie d’établir cette convention, et le tarif auquel l’examen sera remboursé.
Or, c’est là que le bât blesse: «Tous les partenaires s’accordent sur la nécessité d’un tarif unique en points et non en francs (réd.: la valeur du point diffère d’un canton à l’autre), explique Markus Wyser, secrétaire général de la Ligue suisse contre le cancer. Mais le Concordat suisse des assureurs maladie s’oppose à la prise en charge hors franchise. En attendant la prochaine révision de la LAMal, d’ici un à deux ans, qui exigera une telle prise en charge pour tout examen préventif, nous cherchons donc une solution transitoire.»
Faute de solution, le Conseil fédéral édictera lui-même une convention. L’avant-projet devait en effet lui être soumis en mars dernier, délai prolongé à fin septembre. A l’heure de mettre Bon à Savoir sous presse, début octobre, on l’attendait toujours...
En attendant, trois cantons romands – Vaud, Valais et Genève –, seuls prêts à démarrer un dépistage systématique, discutent des projets de convention cantonale. Discussions également freinées par la question des tarifs.
Un retard que regrette notamment Jean-Pierre De Landtsheer, patron de la Fondation vaudoise pour le dépistage du cancer du sein: «Notre projet-pilote de dépistage (suivi en 1997 par 70% des femmes invitées à participer) fonctionne depuis fin 1993 dans les districts d’Aubonne, Morges et Aigle. Et tout est prêt pour le généraliser à tout le canton.» Début octobre, la Fondation et les caisses du canton devaient à nouveau se rencontrer: «Nous sommes optimistes sur le résultat de cette rencontre,
estimait peu avant le Dr De Landtsheer. J’espère que nous pourrons généraliser le dépistage dès janvier prochain.»
Le Valais a également déjà élaboré son programme de dépistage à l’aide de l’expérience vaudoise. Et espère démarrer en janvier. «Nous nous achoppons aussi aux tarifs, notamment parce que nous souhaitons que cet examen préventif soit d’emblée pris en charge hors franchise», note le Dr François Joris, président de la Ligue valaisanne contre le cancer.
Genève le premier?
Genève seul aurait trouvé un accord, selon les responsables du programme. Les caisses devraient verser 200 fr. par mammographie (mais pas hors franchise). Le Conseil d’Etat a aussi débloqué les fonds pour la création de la Fondation chargée d’organiser les examens. Le programme devrait démarrer avant la fin de l’année, ou en même temps que dans les deux autres cantons. Enfin! est-on cependant tenté d’ajouter, sachant que le projet a été élaboré en 1993 déjà...
Une fois le programme lancé, les femmes de 50 à 69 ans seront invitées personnellement, par groupes, en fonction de leurs mois et année de naissance, à se soumettre à une mammographie. Une brochure d’information, élaborée avec la Fondation vaudoise, les renseignera sur tous les détails.
Mortalité abaissée
«Nous voulons atteindre non seulement les femmes déjà conscientes des risques du cancer du sein, mais également celles des milieux défavorisés, moins scolarisées ou étrangères, note le Dr Joris. C’est parmi elles surtout que l’on trouve les stades avancés. On ne pourra pas éradiquer cette maladie, mais la détecter plus précocement. Plus tôt une tumeur est détectée, meilleures sont les chances de guérison et de survie.» En Suisse, quelque 4000 nouveaux cas de cancer du sein sont diagnostiqués par an. Il provoque 5% du total des décès des femmes. Or, en Suède, par exemple, l’examen systématique des 50 à 64 ans a permis d’abaisser la mortalité de 38%.
Ellen Weigand
CONSEILS
Mammographie dès 50 ans
• Les femmes ménopausées et dès 50 ans devraient se soumettre à une mammographie tous les deux ans.
• Les femmes ayant déjà eu un cancer du sein ou dont une proche (fille, mère, sœur) a été atteinte de la maladie, devraient se faire dépister annuellement. L’assurance de base rembourse le coût de l’examen.
En outre, chaque femme devrait procéder à l’auto-examen de ses seins une fois par mois*.
(*) La Ligue suisse contre le cancer publie diverses brochures gratuites, dont Observer-prévenir. L’auto-examen des seins. Commandes au: 031/389 91 00.