Qui ne s’est pas un jour retrouvé avec une bouche irritée à force d’avoir sucé des bonbons? Pour Carmen, Victor, Sébastien et Raphaël, âgés de 5 à 11 ans, il a suffi d’une seule «langue de chat» pour avoir la langue en «compote»! Chez deux d’entre eux, les gouttes de sang perlaient même à la surface de la muqueuse. Et tous les quatre n’ont pu avaler quoi que ce soit au repas suivant, tant les picotements étaient désagréables. Un cinquième petit copain, Arthur, a échappé à ces désagréments: il avait avidement englouti son bonbon par morceaux, sans le lécher.
La composition du bonbon, de la marque hollandaise Red Band, est-elle en cause? Nous l’avons soumise au Laboratoire cantonal vaudois, qui n’y a rien détecté d’anormal. Comme pour d’autres articles gélifiés, le produit contient notamment des acidifiants, des colorants, de la gélatine et différentes sortes de sucre.
Les acides, de type organique, peuvent être, d’un point de vue légal, utilisés en quantité illimitée: plus il y en a, plus les papilles gustatives sont «attaquées». Mais l’effet retombe rapidement, un peu comme avec le piment. La législation sur les denrées alimentaires ne se mêle pas de diététique...
Effet de râpe
Nos quatre bambins semblent avoir avant tout été victimes de l’effet de râpe: les langues de chat sont particulièrement dures et recouvertes de grains de sucre. La société Picus, qui distribue la marque Red Band, en Suisse, assure qu’elle n’a pas connaissance d’autres cas de blessures par bonbons. Mais son directeur, Pierre-Laurent Portier, reconnaît volontiers que «vu la texture du sucre, une déchirure mécanique de la surface de la langue est possible. Il ne faut pas sucer ces bonbons comme des sauvages, cela va sans dire! Nous n’allons tout de même pas fournir des modes d’emploi!» Et pourquoi pas? Allez donc dire à un enfant qu’il ne doit pas lécher son bonbon avec application...
Les bonbons gélifiés sont entrés dans les mœurs et leur contrôle est strict. «Nous y détectons rarement des additifs non autorisés, car les exigences européennes sont semblables aux nôtres», note Alain Etournaud, adjoint au chimiste cantonal vaudois.
Interdit en Suisse
«Seul le jaune de Tartrazine (E102) est interdit en Suisse, mais pas dans les pays de la CE, poursuit M. Etournaud. Ce n’est pas qu’il soit toxique, mais il peut provoquer des allergies. Par ailleurs, nous avons parfois dû retirer des rayons des bonbons de l’Asie du Sud-Est contenant des additifs non autorisés.»
Mais de nombreux vendeurs de bonbons tombent dans l’illégalité pour une raison plus formaliste: ils omettent de tenir à disposition du client la composition des bonbons gélifiés. Ceux-ci sont souvent présentés dans des bacs en plastique, sans papier autour. L’emballage de gros a passé à la poubelle, avec la notice de composition. Lors de leurs contrôles sporadiques, les chimistes cantonaux exigent alors que le vendeur réclame une nouvelle notice au distributeur.
Suzanne Pasquier
vente en vrac
Hygiène parfois douteuse
L’été à la piscine, on les voit plonger leurs petites mains dans les bacs à bonbons pour composer leur assortiment. Les vendeuses des buvettes, trop occupées, ne surveillent guère les manœuvres des gosses et se contentent d’encaisser le prix des sucreries. Dans les kiosques aux heures de pointe, le problème est le même.
Il est vrai que par sa nature (une très faible teneur en eau), le bonbon n’est pas un terrain favorable à la prolifération des germes. Mais l’éventuelle saleté déposée peut tout de même se transmettre au futur consommateur. La législation sur les denrées alimentaires et l’hygiène est très claire à ce sujet: lors d’une vente en vrac, le magasin doit pouvoir garantir la propreté des aliments. Il doit fournir une pince pour le service, ou alors surveiller la clientèle. Si un responsable du contrôle des denrées alimentaire a un doute sur l’hygiène d’un commerce, il peut poser des conditions à la vente en vrac (usage d’une pince, de gants en plastique) ou tout bonnement l’interdire.