Biodégradable et nocif à la fois
Le nouvel étiquetage des produits chimiques provoque des aberrations: une lectrice a découvert un détergent «bien biodégradable», mais «néfaste à long terme pour l’environnement aquatique»!
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Bon à Savoir 04-2006
12.04.2006
Yves-Alain Cornu
On a beau être le consommateur le plus responsable du monde, les commerçants rendent souvent la tâche ardue. Une lectrice en a encore fait l’expérience récemment. Nicole Kohler a en effet reçu un échantillon du produit Hygo WC Power tabs de Migros. Armée d’une loupe, notre lectrice s’est alors essayée au décryptage des petites indications figurant sur l’emballage des tablettes.
N’en croyant presque pas ses yeux, elle s’est empressée de nous envoyer l’emballage, s...
On a beau être le consommateur le plus responsable du monde, les commerçants rendent souvent la tâche ardue. Une lectrice en a encore fait l’expérience récemment. Nicole Kohler a en effet reçu un échantillon du produit Hygo WC Power tabs de Migros. Armée d’une loupe, notre lectrice s’est alors essayée au décryptage des petites indications figurant sur l’emballage des tablettes.
N’en croyant presque pas ses yeux, elle s’est empressée de nous envoyer l’emballage, sur lequel était écrit «Bien biodégradable», mais également «Nocif pour les organismes aquatiques, peut entraîner des effets néfastes à long terme pour l’environnement aquatique» (!).
Fonds marins trompeurs
«Comment osez-vous vendre un tel produit?», a-t-elle également écrit à Migros. Le géant orange lui a répondu par une lettre de deux pages, aux termes très techniques et juridiques, incompréhensibles.
Avant d’interpeller nous-mêmes le distributeur, nous avons découvert, dans son rayon détergents, un produit encore plus surprenant: le Hygo WC Blue water. Son emballage mise tout sur la pureté de l’eau (voir photo): on y voit des coraux et des poissons multicolores, avec la mention très visible: «Bien biodégradable». Mais au verso figure toujours cette phrase sur la nocivité...
Rien à redire!
Les explications de Migros se réfèrent à l’entrée en vigueur du nouvel étiquetage des produits chimiques (lire Bà S 09/2005). Depuis août dernier et durant une phase de transition de deux ans, les produits de nettoyage doivent adopter la nouvelle classification, en conformité avec celle de l’Union européenne. Dès lors, même si les produits Hygo WC n’ont pas changé, leur étiquetage est soumis à cette norme plus rigoureuse.
Migros explique donc que les deux mentions sur l’emballage font référence à des critères différents, mais qu’elles sont les deux justes. Un inspecteur cantonal des produits toxiques et l’Office fédéral de l’environnement confirment aussi que, juridiquement et scientifiquement, cet étiquetage est correct, même s’il apparaît contradictoire. En effet, l’indication «bien biodégradable» se réfère aux composants organiques du produit, tandis que la phrase sur la nocivité porte uniquement sur sa teneur en acides amidosulfuriques. Comprenne qui pourra…
A l’avenir, on peut s’attendre à ce que d’autres produits nettoyants, et pas seulement ceux de Migros, affichent de telles informations contradictoires. Le distributeur promet toutefois de chercher à modifier la composition de ses produits ainsi que la présentation graphique du Hygo WC aux fonds marins idylliques.
Quoi qu’il en soit, avec ces nouvelles normes en matière d’étiquetage, les consommateurs – à moins d’être des spécialistes – auront de plus en plus souvent du mal à comprendre ce qu’ils achètent vraiment!
Yves-Alain Cornu