Pas de demi-mesure: on l’aime ou on la déteste! Apprêtée autrement que sous la forme de salade cubique molle noyée sous la vinaigrette, elle peut pourtant ravir les palais les plus récalcitrants. Et c’est tant mieux, car, sous sa chair rouge sang, elle cache des atouts nutritionnels intéressants et permet de goûter, l’hiver venu, à un produit bien de chez nous, cultivé localement.
De toutes les couleurs
Ce légume, qui figurait déjà au menu des Grecs anciens, a traversé les siècles et les océans pour s’enraciner jusqu’en Inde et en Amérique. En Europe, nous sommes familiers de la betterave sucrière, blanche, exclusivement destinée à la fabrication du sucre. On cultive aussi la betterave fourragère pour le bétail.
Mais celle qui nous intéresse, c’est la betterave rouge, également appelée carotte rouge ou betterave potagère. Elle comprend plusieurs variétés de couleurs diverses, passant du rouge violacé à des teintes plus claires, variant du blanc à l’orange. La plus esthétique, la chioggia, alterne des cercles concentriques rouges et blancs. Si elle est souvent ronde, elle peut aussi être allongée et conique comme la crapaudine, une ancienne variété à l’aspect peu engageant, mais très sucrée et remise à l’honneur par de grands chefs.
Un peu de fantaisie!
Oublions le bortch et la sempiternelle salade! Ce légume, quoique rustique, se prête à des recettes gourmandes: veloutés, verrines, chips, pickles, carpaccio. Et il s’intègre à n’importe quelle salade, se cuit entier en croûte de sel, se déguste en smoothie avec mangue et orange, voire en sauce pour accompagner des coquilles Saint-Jacques poêlées. Les recettes ne manquent pas: même ses feuilles (les bettes) s’apprêtent comme l’épinard ou les côtes de bette! On évitera les très gros spécimen qui sont souvent très fibreux.
Bénéfique pour la santé
Avec 60 kcal pour 100 g, la betterave est peu calorique. Elle contient grosso modo autant de vitamine C que la carotte ou la pomme. Son apport en acide folique (vitamine B9) est intéressant puisque 100 g couvrent déjà le cinquième des besoins journaliers. Cette vitamine est particulièrement importante pour les femmes qui désirent avoir des enfants, car une carence augmente le risque de spina bifida chez le fœtus. Elle n’est pas moins essentielle à tous les âges de la vie: un apport insuffisant provoque de l’anémie et représente un facteur de risque de maladie cardiovasculaire. Cela peut aussi entraîner des maladies comme la dépression, l’ostéoporose ou la maladie d’Alzheimer.
La betterave a d’autres qualités encore. Elle est notamment riche en potassium, un minéral favorisant une bonne régulation de la pression artérielle. Elle ne manque pas de fibres non plus, qui sont mieux tolérées quand elle est cuite ou finement râpée si elle est crue.
Le Nobel pour les nitrates
C’est aussi l’un des légumes les plus riches en nitrates. Ces derniers ont été décriés pendant des lustres, car ils sont susceptibles de se transformer en nitrosamines potentiellement cancérigènes. Aujourd’hui, la vision a radicalement changé: d’une part, on a mis en évidence que la présence d’antioxydants (vitamine C, pigments, etc.) de la betterave inhibe cette transformation. D’autre part, les travaux de Ferid Murad ont démontré que l’oxyde nitrique, qui est produit par la métabolisation des nitrates, est bénéfique pour la santé cardiovasculaire. Ce gaz a pour effet de dilater les vaisseaux sanguins, diminuant ainsi la pression artérielle. La circulation et le flux sanguin s’en trouvent alors améliorés.
Le Nobel de médecine a couronné Ferid Murad pour cette découverte il y a tout juste 20 ans. Plus récemment, en 2014, une étude anglaise a montré que la consommation de jus de betterave était associée à la diminution de la pression artérielle chez des personnes souffrant d’hypertension.
En résumé, c’est un légume qui à de nombreux effets bénéfiques sur la santé. On peut certes lui reprocher de colorer l’urine et les selles en rouge. Mais c’est un phénomène sans danger qui est induit par l’effet de ses pigments.
Doris Favre, diététicienne diplômée