L’atelier de réparation des gros appareils ménagers de La Bonne Combine voit passer régulièrement des machines pour lesquelles un spécialiste a préalablement établi un diagnostic et un devis de réparation, ma foi fort dissuasif. Ce devis est naturellement accompagné d’une offre pour un nouvel appareil. Jusqu’ici, rien d’anormal ou d’étonnant.
Cependant, on est parfois effaré de constater que le devis prévoit le remplacement de toutes sortes de pièces parfaitement fonctionnelles et qu’il a précisément été calculé pour être refusé. Le coût de l’intervention visant simplement à remédier à la panne ne représente parfois que le cinquième de ce devis.
Illustration: une dame d’un certain âge avait acheté, cinq ans plus tôt, un sèche-linge de bonne réputation. Vivant seule, elle utilise très peu son appareil. Lorsqu’une panne survient, elle cherche tout naturellement à le faire réparer en s’adressant au service de la marque.
Le devis qui lui est alors présenté s’élève à environ 1500 francs. Il faut, selon le technicien, remplacer le ventilateur, le corps de chauffe, la carte électronique, des thermostats et diverses petites pièces. Elle se laisse alors tenter par un nouvel appareil.
Comme son «ancien» sèche-linge lui semble encore comme neuf, elle décide d’en faire don à La Bonne Combine. Qui s’aperçoit qu’en réalité, la seule panne effective est une mauvaise soudure sur la carte électronique: aucune pièce détachée, juste quelques heures pour démonter, nettoyer entièrement les conduites et remonter l’appareil, qui repart ainsi avec un an de garantie.
Bien sûr, le technicien pourra toujours se défendre en affirmant que certaines pièces devaient être remplacées préventivement. Mais alors le devis devrait être explicite à cet égard: «La réparation de la panne coûte 200 francs, mais je vous conseille de profiter de l’intervention pour remplacer telle et telle pièce.»
Commission de 2 à 7%
A l’évidence, le fait d’intéresser les réparateurs à
la vente d’appareils neufs peut conduire à des abus. Si la pratique est, semble-t-il, très répandue, elle demeure discrète, pour ne pas dire secrète. Difficile donc de citer des noms et des marques, au risque de jeter le discrédit sur certains seulement et de faire des généralités de quelques histoires particulières. On peut tout de même dire que, lorsqu’elles existent, les commissions versées aux réparateurs sur les ventes qu’ils concluent oscillent entre 2 et 7% du prix de vente.
Pour un technicien qui visiterait cinq clients par jour et auxquels il parviendrait à vendre systématiquement deux appareils
à 1500 fr., le gain supplémentaire pourrait atteindre 4200 fr. par mois. De quoi presque doubler
le salaire! Difficile dans ces conditions de ne garder que l’intérêt du client à l’esprit.
Récompenser le durable
On est ici à la limite de l’escroquerie et la responsabilité des entreprises est en cause. Pour retrouver leur entière crédibilité, celles-ci devraient peut-être imaginer un système de prime à la réparation versée aux techniciens qui réparent pour le prix le plus bas. Ou à ceux qui remettent en fonction les machines les plus âgées. Ce serait aller dans le sens du développement durable, mais, il est vrai, un peu à contre-courant de la logique commerciale à court terme.
En attendant, celui qui se voit proposer un appareil neuf par un réparateur devrait oser lui demander s’il touche une commission sur cette vente. Si la réponse est oui, ou en cas de doute, mieux vaudrait demander un second diagnostic ailleurs.
François Marthaler
*) La Bonne Combine
Réparations en tous genres
4, rte de Renens – 1008 Prilly