A boire ou à manger

«A midi, nous ne servons que les clients qui mangent!» En refusant de servir ceux qui ne veulent qu’une boisson, un restaurateur agit dans son droit... mais pas dans son intérêt.

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Bon à Savoir 10-1999

13.10.1999

Blaise Guignard

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Sur le coup de midi, s’arrêter dans un bistrot pour boire quelque chose tient souvent de la mission impossible. Patricia Rossi en a récemment fait l’expérience. Souhaitant prendre un café, elle s’est vu éconduire successivement et sans trop d’amabilité de deux restaurants, sous prétexte qu’à cette heure là, les tables étaient réservées aux repas. Un renvoi qui a incité notre lectrice à interroger Bon à Savoir: un restaurateur a-t-il le droit de «chasser» des clients qui ne désireraient qu’une boisson, en arguant que les tables sont destinées à ceux qui veulent manger?
La réponse est un «oui, mais». Sur le plan légal, la liberté de commerce garantie par la Constitution fédérale permet à tout restaurateur de décider s’il veut servir des clients ou pas. Ce droit n’est limité que par l’«obligation de servir» encore en vigueur dans trois cantons romands (Jura, Genève, Fribourg), datant de l’époque lointaine où les bistrots ne couraient pas les rues. Autre limite, moins folklorique: les dispositions du Code pénal qui sanctionnent les actes de discrimination en fonction de la race, du sexe, de la religion, etc. Cela mis à part, rien ne s’oppose à ce qu’un patron refuse des buveurs pour n’accueillir que les mangeurs.
Mais... comme le dit Hans Peyer, de Gastrosuisse, «un restaurateur ne gagne sa vie qu’avec les clients qu’il sert, pas avec ceux qu’il ne sert pas». Au vu de la précarité de la restauration en Suisse, refuser de servir des clients est un luxe que peu de patrons peuvent raisonnablement s’offrir. «Surtout, ajoute Hans Peyer, lorsqu’on sait qu’un quart des cafés et restaurants de Suisse change de patron une fois par an».
La solution s’impose d’elle-même: faire bon accueil aux uns comme aux autres. Certes, les plaintes de clients ne trouvant pas de place pour manger, alors que des tables sont occupées par de «simples buveurs», font partie des réclamations les plus fréquen-
tes adressées aux cafetiers. Mais comme le dit Gastrosuisse dans une brochure de directives édictées à l’intention des patrons d’établissements: «Il faut néanmoins s’arranger pour que le client qui ne peut ou ne veut que boire quelque chose trouve également où s’asseoir.»
Blaise Guignard

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