En février dernier, le scandale des lasagnes à la viande de cheval a brutalement mis en lumière les dérives de l'industrie agroalimentaire. L'émoi qu'il a suscité était tel que le monde politique parlait d'une même voix pour promettre aux consommateurs une meilleure protection. On pouvait donc s'attendre à ce que l'indignation générale profite à l'une des révisions en cours, celle de la Loi sur les denrées alimentaires.
Opacité des contrôles d'hygiène
Neuf mois plus tard, la bonne volonté politique s'est hélas édulcorée. Hier, le Conseil national a fait volte-face sur deux points essentiels. Par 107 voix contre 71, il s'est rallié au Conseil des Etats en refusant aux clients le droit de consulter le certificat de conformité des établissements (cafés, restaurants, etc.).
Ainsi, contrairement à la volonté du Conseil fédéral, les chambres fédérales soutiennent l'opacité actuelle qui empêche les consommateurs de connaître les résultats des contrôles d'hygiène. La droite a défendu le statu quo en craignant que la transparence ne stigmatise les établissements sans certificat de conformité. Dans le projet, ces derniers auraient pourtant eu une seconde chance d'obtenir leur sésame dans les six mois à venir.
Le second point que les parlementaires ont fait passé à la trappe touche directement les enfants. En effet, le projet donnait la possibilité au Conseil fédéral de restreindre la publicité qui leur est destinée lorsqu'elle incite à la malbouffe. Par 95 voix contre 81, le Conseil national a suivi les sénateurs en refusant cette mesure qui visait à lutter contre l'augmentation de l'obésité infantile. La droite a boudé cette disposition préventive en la jugeant trop compliquée et sans véritable impact sur la façon de manger des enfants.
Provenance sur les étiquettes
Le seul élément réjouissant, c'est que la chambre basse n'a pas emboîté le pas du Conseil des Etats au sujet de l'étiquetage des denrées alimentaires. Par 95 voix contre 81, elle a estimé que la provenance des matières premières devait être indiquée sur les produits préemballés et les marchandises en vrac. Une information précieuse que la chambre haute avait choisi de supprimer dans sa séance du 17 septembre dernier. Par conséquent, le projet de révision de la Loi sur les denrées alimentaires n'est pas près d'être entériné. Il retournera au Conseil des Etats déjà bien vidé de sa substance initiale.
Yves-Noël Grin