Rangers à l’assaut des personnes âgées
Chargée par Sunrise de vendre des abonnements, la société Ranger n’hésite pas à démarcher des nonagénaires. L’opérateur tente, sans trop de conviction, d’éviter les abus.
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Bon à Savoir 04-2003
09.04.2003
Dernière mise à jour:
20.05.2023
Blaise Guignard
Yvette Genoud est scandalisée: chargée de gérer les intérêts de sa tante, elle découvre fin janvier que la vieille dame a signé sans le savoir un contrat de présélection avec l’opérateur Sunrise. Les deux démarcheurs qui lui ont rendu visite l’ont laissée croire qu’il s’agis-sait simplement d’agréer au remplacement de son vieil appareil... «Il ne faut pas beaucoup de pudeur ni de respect envers les personnes âgées pour se permettre de faire signer un contrat en racon...
Yvette Genoud est scandalisée: chargée de gérer les intérêts de sa tante, elle découvre fin janvier que la vieille dame a signé sans le savoir un contrat de présélection avec l’opérateur Sunrise. Les deux démarcheurs qui lui ont rendu visite l’ont laissée croire qu’il s’agis-sait simplement d’agréer au remplacement de son vieil appareil... «Il ne faut pas beaucoup de pudeur ni de respect envers les personnes âgées pour se permettre de faire signer un contrat en racontant n’importe quoi à une dame de 97 ans!», fulmine notre lectrice de Lonay, qui a immédiatement fait résilier l’abonnement.
«Ma tante est une adorable vieille dame, raconte-t-elle. Elle s’est plainte de son vieil appareil auprès des démarcheurs. Ceux-ci ont laissé entendre qu’ils pourraient le lui changer. Elle ne s’est même pas rendu compte qu’elle donnait en sus son accord à un changement d’opérateur, d’ailleurs sans intérêt au vu de ses habitudes téléphoniques!»
Précédents
A Bon à Savoir, l’histoire de Yvette Genoud a fait «tilt» (ou plutôt «dring»): en effet, le magazine alémanique K-Tipp s’est récemment fait l’écho de nombreux cas similaires. Tous se sont soldés par un abonnement non désiré à Sunrise, résilié aussitôt découvert. Outre l’âge respectable des victimes, tous ont un point commun: à chaque fois, les agents de Sunrise sont des «rangers», des employés de la société Ranger Switzerland GmbH, une société internationale de vente directe avec laquelle Sunrise travaille depuis 1999.
Pressions
Interpellé par Bon à Savoir sur le cas évoqué par notre lectrice, Ranger n’a pas hésité à appeler cette dernière pour tenter de la faire revenir sur ses propos. Sans trop de tact, la société a même envoyé une nouvelle fois ses «rangers» à l’assaut de la vieille dame, afin de la convaincre – la voisine étant appelée en renfort comme témoin – qu’elle avait mal compris…
Pour le reste, Marcel Schürch, CC-Manager de Ranger, nie en bloc et doute de la bonne foi d’Yvette Genoud: «Il va de soi qu’on doit accorder du crédit aux déclarations de la cliente, posées, fiables et confirmées par des témoins. Mais les raisons poussant la nièce, non concernée, à des déclarations fallacieuses demeurent obscures.»
Porte-parole de Sunrise, Mathieu Janin admet que «ces cas de figure nuisent tant à notre clientèle qu’à Sunrise», et énumère les mesures prises pour les éviter au maximum: notamment la signature d’un code de conduite par l’ensemble du personnel de Ranger Switzerland, le port d’un badge d’identité par les «Rangers», et la vérification stricte de chaque nouveau contrat. Dans les trois jours après sa signature, un employé de Ranger téléphone en effet au nouvel abonné, pour s’assurer qu’il a bel et bien voulu contracter, et s’enquérir de l’attitude du démarcheur.
Ranger Switzerland n’est pourtant guère crédible dans ce double rôle de juge et partie. De fait, les mesures prises par Sunrise sont manifestement parfaites pour annuler sans difficulté des contrats conclus dans des conditions douteuses. Mais elles semblent moins adéquates pour éviter toute tentation à des «rangers» placés devant des personnes ne saisissant pas tous les tenants et aboutissants de la situation, mais très disposées à faire plaisir.
Blaise Guignard