La météo de ces six derniers mois s’est révélée complètement hors normes, puisqu’aucun anticyclone n’est parvenu à s’installer plus de deux ou trois jours (à l’exception d’une semaine en automne). A l’automne pluvieux a succédé un hiver doux et arrosé (avec une ébauche de printemps en février), lui-même relayé par des pluies torrentielles en mars et un retour de l’hiver en avril!
Cette suite d’épisodes atypiques a pesé sur notre moral… et donné du fil à retordre aux météorologues. Pour le mois d’avril, 44% des prévisions pour le week-end publiées le mercredi ne se sont pas vérifiées (voir notre test ci-contre). Dans la tempête, les spécialistes ont néanmoins le sentiment de maintenir le cap. Ont-ils parfois été un peu trop prompts à annoncer le retour du soleil? «Nos prévisions doivent se lire avec l’indice de fiabilité», répondent-ils en chœur. Celui-ci a été particulièrement faible au mois d’avril.
Alors pourquoi faire des prévisions à cinq jours en ajoutant qu’elles n’ont que 30% de chance de se révéler exactes? «C’est une information, lâche Philippe Jeanneret, Monsieur Météo à la TSR. De plus, nous avons la chance de pouvoir dire ce qu’elle vaut. Avec un mauvais indice, elle est tout de même utile, car elle signale aux gens qu’ils ne doivent pas prendre de décision en fonction du temps.» Lionel Fontannaz, de Météosuisse, ajoute: «Le public nous réclame des informations de type déterministe. Et l’indice à cinq jours peut être de 60% ou plus. En mars par exemple, les prévisions ont été assez précises et très utiles, en particulier aux agriculteurs, qui ont pu tabler sur la pluie.»
Journaux lacunaires
Pour les bulletins du milieu de la semaine concernant le week-end, un taux de fiabilité de 60% commence à être intéressant. Au-dessous, mieux vaut ne pas planifier une broche ou faire une croix définitive sur la randonnée en montagne. A la radio et à la TV, les présentateurs le font souvent comprendre avec des formules au conditionnel et un ton prudent.
Dans les journaux ou sur Internet en revanche, certaines rubriques météo n’indiquent pas le taux de fiabilité. «Nos clients ne nous le demandent pas toujours, explique Christophe Salamin, de Météonews, un service privé qui travaille pour plusieurs journaux. Nous ne le signalons par exemple pas dans Le Temps, tandis que nous le publions dans Le Nouvelliste, auprès duquel les lecteurs s’étaient plaints du manque de précision des prévisions à plusieurs jours.»
Une science
Loin d’être des «Madame – ou Monsieur – Soleil», les météorologues se considèrent comme des scientifiques. Si l’incertitude est leur lot quotidien, les instruments de mesure, sont, quant à eux, particulièrement pointus. A partir des données en temps réel, fournies par les stations de mesure (75 en Suisse) et la carte satellite, des spécialistes établissent des modèles de prévision informatiques à sept jours. Pour tester leur valeur, ils en modifient les données de base artificiellement. Si le modèle change peu, c’est qu’il est assez bon.
Depuis une vingtaine d’années, la météorologie a fait de grands progrès. Mais les prévisions à quinze jours, que certains annonçaient, restent illusoires. Météosuisse, l’Office fédéral de météorologie, estimait récemment à 83% l’exactitude de ses résultats. «Cela est vrai pour les prévisions jusqu’à trois-quatre jours, précise Lionel Fontannaz, responsable de l’information pour la Suisse romande. Le problème, c’est que lorsqu’on annonce juste, personne ne s’en souvient et lorsqu’on se trompe, personne ne nous rate!»
Le facteur humain
Optimistes, pessimistes? Les prévisionnistes assurent ne pas subir de pressions: ne serait-ce que pour des raisons de sécurité, ils essaient de se montrer le plus objectif possible. «Je prends connaissance de la situation avec le spécialiste de Météosuisse, raconte Philippe Jeanneret. Nous discutons de comment communiquer la part d’incertitude. Mais lorsqu’il y a, par exemple, une chance sur deux d’avoir des éclaircies en Valais, il faut faire un choix. La personnalité du présentateur joue aussi un rôle: il existe des natures plus optimistes que d’autres.»
Bulletins spéciaux
En Suisse romande, Météosuisse* concocte le bulletin 162, informe la TV, la radio romande et quelques journaux. L’Office fédéral propose aussi des prévisions pour l’agriculture ainsi que toute une série de bulletins spéciaux: pollens, végétation, grippe, UV etc.
Météonews**, de son côté, «arrose» des quotidiens et des radios locales. Ce service privé, qui reçoit l’essentiel des données de base de Météosuisse, a particulièrement développé les prévisions régionales et cantonales.
Suzanne Pasquier
*www.meteosuisse.ch
**www.meteonews.ch
vrai ou faux?
Les croyances et la réalité
Les croyances et les dictons se révèlent souvent fondés pour les prévisions à court terme et les phénomène locaux. Mais ils reposent parfois sur… du vent.
- Reliefs peu nets, signe de beau temps: la haute pression a tendance à capturer les poussières. Comme les masses d’air stagnent, elles rendent l’horizon légèrement brumeux. En été, des montagnes limpides annoncent en revanche la fin de la haute pression.
- Ciel pommelé, signe de mauvais temps: par vent du sud, les nuages moutonnants annoncent effectivement une perturbation. Mais celle-ci peut aussi passer juste à côté!
- Ciel rose le soir, beau le lendemain: la clarté du ciel au soleil couchant est souvent annonciatrice de beau temps, car la plupart des perturbations viennent de l’ouest.
- Ciel rose le matin, mauvais temps la journée: le soleil levant donne une couleur rose aux sirus d’altitude. Or, ceux-ci sont annonciateurs de mauvais temps.
- Les hirondelles volent bas, il va pleuvoir: quand l’air se charge d’humidité, les insectes volent au ras du sol. Et comme ils constituent le repas des hirondelles…
- La bise dure 3, 6 ou 9 jours: cette maxime n’est pas fondée. On peut tout au plus dire que la bise peut durer plusieurs jours.
- Changement de lune, changement de temps: totalement infondé!
avril: prévision du mercredi au week-end
Nous avons comparé les prévisions à 4 et 5 jours (du mercredi au samedi-dimanche) des quatre principaux services météo de Suisse. Qui n’ont pas eu la tâche facile en avril! Au total, 56% des résultats se sont révélés exacts et 44% ne se sont pas vérifiés. Ce sont Météosuisse et Meteotest qui s’en sortent le mieux, avec cinq prévisions justes sur huit. Suivent Météonews et Meteomedia, avec quatre bons résultats et quatre mauvais. Mais en matière de météo, difficile d’être précis, y compris pour les testeurs! Nous avons par exemple considéré la combinaison nuages/pluie/soleil comme juste, même si les averses étaient faibles en comparaison de l’ensoleillement.
En septembre dernier, le journal K-Tipp avait enregistré 30% de résultats corrects seulement! Météosuisse et Météonews étaient les meilleurs, à égalité, suivis de Meteomedia et de la radio DRS.