Nul besoin d’être Claudia Schiffer ou Brad Pitt pour intéresser les curieux. Toutefois, ce que
gagne, consomme, pense ou achète M. ou Mme «Duchemol» sont des informations précieuses à ne pas mettre entre toutes le mains.
En Suisse, la Loi fédérale sur la protection des données (LPD) constitue un bon garde-fou. Mais elle laisse dans une large mesure le soin à la personne concernée de faire valoir ses droits. C’est donc au consommateur de veiller aux informations personnelles qu’il divulgue, et c’est à lui de réagir si ces données sont traitées de manière illicite.
Or, il n’est pas facile de déterminer qui peut vous demander quoi et à quelles fins.
Au cas par cas
L’expérience de Chantal Perret-Gentil illustre bien la complexité du problème. Notre lectrice refuse que sa pharmacie enregistre dans sa base de données ses coordonnées, la date de son ordonnance, ainsi que le nom de ses médicaments, comme le prévoit le nouveau système de rémunération des pharmaciens. «Le piratage et la violation du secret professionnel étant monnaie courante, je ne veux pas que des informations aussi sensibles soient mises sur le réseau informatique, explique Mme Perret-Gentil. Il serait dès lors facile de connaître mon état de santé.»
Notre lectrice cherche donc conseil auprès du Préposé fédéral à la protection des données. Sa réponse est nuancée: «Lorsque le client ne paie pas au comptant les médicaments, la quantité des données recueillies pa-raît adéquate pour l’établissement du décompte pour la caisse maladie. En revanche, si le client paie tout de suite, une facture n’est alors pas nécessaire et la saisie de données est superflue. Dans ce cas, le client peut refuser de communiquer toute information.»
Pour les personnes concernées par le premier cas de figure, Kosmas Tsiraktsopulos, porte-parole du Préposé, souligne que ce type de système informatique est obligé d’être équipé des meilleures sécurités existantes.
Données sensibles
Toutefois, notre lectrice a raison de se renseigner, car il convient de se montrer vigilant dès que les questions touchent des données sensibles, telles les opinions ou activités religieuses, philosophiques ou syndicales, la santé, la sphère intime ou l’appartenance à une race, les mesures d’aide sociale, les poursuites ou les sanctions pénales ou administratives.
Lorsqu’on remplit un formulaire ou qu’on participe à un sondage, par exemple, il faut se faire expliquer clairement qui pose ces questions, dans quel but et si les informations ainsi récoltées seront communiquées à des tiers. Lorsqu’on vous répond de manière évasive, la méfiance est de mise!
Vos données ne peuvent être transmises à des tiers qu’avec votre accord et vous pouvez généralement refuser de répondre aux questions émanant du secteur privé. Nul ne peut vous contraindre à participer à un sondage. En revanche, vous êtes obligé de répondre aux questions du recensement fédéral qui, elles, émanent des autorités du pays.
Ce qui ne signifie pas que l’Etat, les cantons ou les communes puissent s’informer absolument sur tout. Les limites sont fixées par diverses législations, qu’on doit être en mesure de vous présenter. En cas de doute, les Préposés cantonaux à la protection des données ou le Préposé fédéral peuvent vous aider (lire encadré).
Si la prudence est conseillée, refuser de divulguer toute donnée personnelle peut néanmoins constituer un sérieux handicap. Ainsi, sans certificat de salaire, vous n’obtiendrez probablement pas de bail. Comme le remarque Kosmas Tsiraktsopulos, il est normal que des sociétés demandent des garanties, dans la mesure, toutefois, où les informations exigées sont proportionnelles à l’engagement envisagé.
L’exemple des CFF
Pour établir un abonnement général payable mensuellement, les CFF vérifient ainsi
la solvabilité des nouveaux clients sur la base d’un questionnaire. Ce qui a déplu à Yves Vouardoux: «Ma profession et mon état-civil ne les regardent pas.» Mais on peut difficilement leur reprocher de se renseigner lorsque quelques milliers de francs sont en jeu. Comme le précise le porte-parole des CFF, Jean-Louis Scherz: «Les données que nous récol-tons sont détruites dès la fin du contrôle. Seuls le nom du client, son adresse et la durée de validité du transport sont conservés dans nos fichiers.»
Si, par mégarde, vous avez manqué de discrétion, sachez encore qu’il est presque toujours possible de vérifier les données qui sont enregistrées à votre sujet, car la Loi sur la protection des données autorise toute personne à en demander l’accès. Pour cela, il suffit de s’adresser au maître du fichier concerné. En outre, sauf exception, vous avez le droit de faire rectifier, bloquer ou effacer ces informations. Diverses voies de recours sont prévues: à vous de faire respecter la loi!
Joy Demeulemeester
pour en savoir plus
M. Fiches vous informe
Le Préposé fédéral à la protection des données tient à la disposition des consommateurs les lois en la matière, des informations sur les possibilités de recours, des lettres types, ainsi que des recommandations sur l’attitude à adopter sur Internet, lors de sondage, vis-à-vis des gérances, des banques, etc.
Il est également possible de lui soumettre des cas précis par écrit:
Préposé fédéral à la protection des données (PFPD)
3003 Berne – Tél. 031 322 43 95.
Son site Internet contient quantité d’informations actualisées et de liens: www.edsb.ch