Olivier Kuepfer, de Savigny (VD), connaît bien le domaine des assurances, ce qui fait de lui un consommateur averti. Mais combien d’autres auront cédé à la lecture de ce courrier, envoyé par un démarcheur d’Alba Assurance: «Votre assurance responsabilité civile privée arrive prochainement à échéance, et pour éviter un défaut de couverture, nous nous permettons de vous adresser une nouvelle proposition pour signature.» Derrière cet apparent élan de bienveillance, notre lecteur a immédiatement remarqué que la prime proposée était augmentée de 35% (de 111.60 fr. à 151.20 fr.) et que ce nouveau contrat avait une durée minimale de 10 ans!
Et ce n’est pas tout! L’avertissement envoyé était en fait trompeur. En effet, l’échéance du contrat avait eu lieu à fin 2006 déjà. Mais comme pour la plupart des contrats de longue durée, la police d’Alba prévoyait qu’une fois l’échéance atteinte, le contrat se reconduirait tacitement d’année en année (lire aussi l’encadré). En clair, notre lecteur ne risquait absolument aucun «défaut de couverture» puisque, sans résiliation du contrat, celui-ci était automatiquement prolongé.
Nouvelle proposition
Agacé par la grossièreté de la méthode, Olivier Kuepfer a aussitôt protesté, par écrit, auprès du démarcheur. Sans réponse, il s’est alors adressé à un agent général d’Alba. Ce dernier lui a proposé un contrat résiliable après cinq ans, avec un rabais de 20%.
Au final, cette offre restait moins avantageuse que le contrat en cours. Dès lors, pourquoi accepter de signer? En effet, sans rien faire, notre lecteur pouvait continuer à jouir de son ancien contrat. Ce qu’il s’est empressé d’indiquer à son interlocuteur: «Comment voudriez-vous qu’en toute logique, je puisse aller dans votre sens? Ma prime actuelle demeure moins chère, et je suis de surcroît libre de révoquer ce contrat d’année en année.»
Assureur empêtré
Empêtré dans cette affaire, l’agent d’Alba a transmis le dossier au chef du service interne de l’agence de Lausanne, Claude-Alain Blanc. Celui-ci a confirmé que le contrat de M. Kuepfer n’arrivait pas à une échéance particulière et qu’il a donc été reconduit pour une année. Il a cependant tenté d’expliquer à l’assuré que le contrat d’origine était vieux de 20 ans, et que les prix avaient bien augmenté depuis.
Ce dernier argument est fort compréhensible, mais pourquoi diable ne pas l’avoir évoqué clairement dès le début, au lieu d’alarmer M. Kuepfer avec une fausse histoire de perte de couverture? Nous avons posé la question à M. Blanc: «Alba n’a pas pour habitude d’augmenter les primes en cours de contrat en RC; nous préférons proposer une nouvelle police. Toutefois, le ton employé par notre collaborateur externe, sur sa propre initiative, est tout à fait déplorable. Si un assuré le demande, nous acceptons généralement de réduire le délai initial du contrat à une année. J’ignore pourquoi cela n’a pas été proposé à M. Kuepfer.»
L’assuré laisse venir
A l’écoute de ces réponses, Olivier Kuepfer ne cache pas son amertume: «On m’a certifié qu’il n’était pas possible de renouveler le contrat pour une année seulement.»
Pour l’heure, notre lecteur bénéficie toujours de son ancien contrat jusqu’à la fin de l’année. S’il n’entreprend aucune démarche, ce contrat se reconduira encore et encore. Mais Alba a été clair sur ce point: «Nous ne pouvons pas laisser durer cette situation éternellement. Si l’assuré continue de refuser le nouveau contrat, nous saisirons alors le prochain délai pour résilier sa police actuelle.» Ce qui laisse toute l’année à notre lecteur pour voir venir et, qui sait, changer d’assureur à la fin de l’année?
Yves-Alain Cornu
Ce que dit la loi
Les contrats de longue durée sont la plupart du temps renouvelables automatiquement, pour des raisons pratiques évidentes (abonnements de journaux, contrats d’assurance, de téléphonie, etc.). Plus les renouvellements sont longs, plus les sociétés qui proposent de tels contrats s’assurent une clientèle captive. Heureusement, l’art. 47 de la Loi sur le contrat d’assurance précise que les clauses prévoyant un renouvellement tacite ne peuvent avoir d’effet que pour une année au maximum. Raison pour laquelle les assureurs, comme Alba dans le cas présent, préfèrent proposer un nouveau contrat, dont la durée initiale peut allègrement atteindre 10 ans (lire également le témoignage en page 11).